Le Temps

Qu’importe l’objectif, pourvu qu’on ait le voyage

- F. G.

Nintendo confirme avec «Super Mario Odyssey» sa volonté de réinventer le rapport qu’entretient le joueur avec son environnem­ent

Le mot «Odyssey» (odyssée) dans le titre met la puce à l’oreille, et les premières heures de jeu le confirment: le voyage occupe une place centrale dans les nouvelles aventures de Mario. Comme Zelda: Breath of The Wild, sorti sur Switch en mars cette année, le jeu fait de l’exploratio­n une récompense en elle-même. Comme si finalement, peu importait le but, l’important étant le chemin parcouru.

Suggérer plutôt que diriger

D’un premier abord, les deux production­s Nintendo reprennent une formule qui fait le succès des habituelle­s superprodu­ctions vidéoludiq­ues (Assassin’s Creed, Fallout, The Witcher…): placer le personnage dans un univers aussi immense que possible pour lui donner une impression de liberté. Mais la ressemblan­ce s’arrête là. Alors que la plupart des jeux prennent le joueur par la main à l’aide de guides visuels, de marqueurs placés sur la carte et de quêtes secondaire­s en pagaille, Zelda: Breath of The Wild laisse le joueur se débrouille­r, réfléchir et chercher par luimême. Plutôt que d’envoyer le joueur à un point X sur la carte, il lui explique le chemin: (suivre une côte, longer une forêt…). Il ne dirige pas, il suggère. Il n’envoie pas le joueur vers un objectif, le voyage devient l’objectif.

On retrouve cette même philosophi­e minimalist­e dans Super Mario Odyssey. La carte globale de l’univers est schématisé­e par un plan qui rappelle une ligne de métro où chaque monde représente un arrêt. Une fois descendu de la rame, le joueur peut consulter un prospectus rédigé comme un guide touristiqu­e, lequel distille quelques vagues informatio­ns sur les endroits à visiter. Tout est fait pour aiguiser la curiosité et pousser à aller voir un peu plus loin.

Changement de paradigme

Pour s’orienter, Mario peut se hisser en hauteur pour repérer les environs et laisser au joueur le soin de décider des prochaines étapes du voyage. Et qu’importe si les plans initiaux sont oubliés ou remplacés par d’autres, c’est justement ce que recherchen­t les développeu­rs du jeu: laisser le joueur se promener au gré de ses envies. Chaque route que l’on suit exactement jusqu’au bout ne mène exactement à rien, écrivait Frank Herbert…

Acclamés par la critique et par l’industrie, notamment pour cette approche de l’exploratio­n, Zelda et Mario feront sans nul doute des émules dans le monde du jeu vidéo. Plus qu’une simple nouveauté de gameplay, c’est peut-être un changement de paradigme que Nintendo vient d’initier.n

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