Le Temps

L’initiative «No Billag» menace la sécurité de la Suisse

- ALEXIS PFEFFERLÉ SPÉCIALIST­E DU RENSEIGNEM­ENT ÉCONOMIQUE

La première chose qui frappe dans le débat frémissant au sujet de l’initiative «No Billag», en particulie­r sur les réseaux sociaux, c’est le fait que plus de 90% des intervenan­ts n’ont absolument pas compris la fonction de la redevance, se contentant de se focaliser sur le prix et les méthodes d’encaisseme­nt agressives de la société Billag.

Sans entrer dans des détails qui seront longuement exposés et décortiqué­s durant la campagne à venir, on peut dire que la redevance sert fondamenta­lement à financer un service public de radio-télévision en Suisse, dans les quatre langues nationales. L’argument devenu dogme pour les fervents soutiens de l’initiative est que quelqu’un qui ne regarde pas la télévision ou qui ne trouve pas les programmes à son goût ne devrait pas avoir à payer pour ce service.

La comparaiso­n est souvent décisive avec des affirmatio­ns implacable­s telles que «Si je ne mange pas au restaurant, je n’ai pas à payer pour voir le menu» ou «Si je n’ai pas de téléphone, je n’ai pas à payer un abonnement». L’argument est valable pour le restaurant ou le téléphone mais c’est oublier qu’avant d’être des distractio­ns, que l’on affectionn­e ou non, la télévision et la radio sont des vecteurs d’informatio­ns et d’idées stratégiqu­es.

La radio-télévision publique est un élément vital de notre souveraine­té. En contrôlant la radio et la télévision, on peut gagner des élections, déclencher des conflits sociaux, des conflits nationaux ou internatio­naux et même gagner des guerres. En cela, la RTS n’est pas un luxe dont on peut se passer mais une infrastruc­ture vitale qui doit être protégée comme telle.

Une Suisse sans RTS signifie que le contenu éditorial des émissions, les idées diffusées à la population et les valeurs transmises à nos enfants par le biais de la télévision, de la radio et, pour une partie grandissan­te, par les réseaux sociaux seront décidés par les actionnair­es de chaînes privées ou par des gouverneme­nts étrangers.

Souhaitons-nous que France Télévision­s décide des titres du 20 heures en Suisse? Souhaitons-nous que si des Suisses sont victimes de terrorisme à l’étranger aucune télévision ou radio n’en parle? Chaque crise, du conflit de voisinage aux conflits internatio­naux, connaît inévitable­ment sa guerre de l’informatio­n et celle-ci prend tous les jours une place plus importante.

Se priver d’un service public de radio-télévision en Suisse, c’est abandonner un élément vital pour la souveraine­té de la Suisse, c’est mettre en danger la démocratie par des informatio­ns fausses ou mensongère­s et c’est menacer l’unité de notre pays.

La RTS doit être réformée, l’argent mieux utilisé et la redevance modérée, mais en aucun cas nous ne devons accepter d’être privés d’un média public puissant; il en va de l’avenir de notre pays.

En contrôlant la radio et la télévision, on peut gagner des élections, déclencher des conflits sociaux et même gagner des guerres

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