«L’encadrement des ICO devra venir de l’industrie elle-même»
INTERVIEW La législation suisse permet-elle de surveiller les levées de fonds en crypto-monnaies? De nouvelles lois sontelles nécessaires? Les réponses d’Adrien Tharin, Dalmat Pira et Leandro Lepori, avocats spécialisés dans les nouvelles technologies chez Altenburger Ltd legal + tax Pourquoi Tezos est-il un cas d’école pour les
ICO, selon vous? Pour deux raisons. La première est que, vu l’ampleur des sommes levées et la médiatisation de ce dossier, Tezos pourrait détériorer la confiance du public dans les ICO et les crypto-monnaies en général. Les régulateurs pourraient réagir de manière disproportionnée. Seconde raison: l’impact pourrait être négatif sur les investisseurs, et donc également sur les entreprises qui ont recours à ce nouveau mode de financement.
Le cadre réglementaire suisse est-il propice aux ICO et plus généralement aux activités liées à la technologie blockchain et aux crypto-monnaies? De nombreuses ICO ont été lancées depuis la Suisse, mais ce n’est pas seulement une question de cadre réglementaire. Le pays offre les infrastructures nécessaires, un savoir-faire idéal pour ce type d’activité ainsi que des outils juridiques comme les fondations. Globalement, la Suisse est plutôt en avance dans les activités liées aux crypto-monnaies: on peut payer certains services administratifs en bitcoins à Zoug, il est possible de créer une entreprise en apportant un capital en crypto-monnaie, par exemple.
Le droit actuel est-il adapté aux ICO? Une réglementation spécifique serait-elle souhaitable? Le cadre réglementaire existant n’est pas mauvais. Avec les nouvelles lois sur les services financiers et les établissements financiers [LSFin et LEFin], la transparence et la protection de l’investisseur seront renforcées. Mais le droit existant ne couvre pas toutes les configurations possibles des tokens obtenus lors des ICO. Le statut juridique d’un token ou d’une donnée n’est pas très clair. Il faudrait par exemple étendre le régime de propriété à des crypto-monnaies, qui sont des objets encore mal connus. De manière générale, de nouvelles prescriptions devraient venir de l’industrie ellemême.
En quoi devraient-elles consister? Les praticiens des crypto-monnaies ou leurs associations faîtières devraient élaborer des codes de conduite, des «best practices» ou des règles prudentielles. Il existe un besoin de connaître le déroulement d’une ICO, sa structuration. Cela permettrait de renforcer la transparence et la confiance du public, et de donner une meilleure image à ce monde encore peu connu.