Le Temps

A l’Emeraude quadruple sa surface de vente et s’associe à Rolex

HORLOGERIE Le détaillant multimarqu­e de Lausanne voit sa surface de vente passer de 60 à 260 mètres carrés. Et s’associe avec la première marque horlogère du monde

- VALÈRE GOGNIAT @valeregogn­iat

Tout sent encore le neuf. Ce matin, avant l'ouverture, les montres ne sont pas dans les vitrines et les affaires du peintre dorment encore dans l'escalier. Derek Cremers, patron du magasin lausannois A l'Emeraude, ne cache pas sa satisfacti­on de faire visiter sa nouvelle boutique.

Cette semaine, le détaillant horloger multimarqu­e inaugure un agrandisse­ment conséquent de sa boutique, qui voit passer sa surface de vente de 60 à 260 mètres carrés. «C'est un très gros pas pour nous. Un investisse­ment unique dans nos vies», confie le directeur du magasin, qui emploie désormais 14 personnes (soit six de plus qu'auparavant). Toujours installée sur la place Saint-François, A l'Emeraude a non seulement investi le 1er étage de son immeuble pour en faire un atelier-salon, mais a également transformé la pharmacie attenante en un espace de vente unique en Suisse, réunissant Patek Philippe et Rolex.

Installé à Lausanne depuis 1909, en mains de la famille Cremers depuis 2004, A l'Emeraude vend les montres de 12 marques horlogères parmi lesquelles Patek Philippe, Jaeger-LeCoultre, Hublot, F.P. Journe ou encore Voutilaine­n. Rien ne vient de chez Swatch Group – «Nous avons préféré nous concentrer sur d'autres marques», balaie simplement Derek Cremers – mais, surtout, depuis l'agrandisse­ment de sa boutique, Derek Cremers peut compter sur Rolex. «Un accompliss­ement», assure le patron.

«Une assurance vie», persifle un concurrent envieux. Pour un détaillant multimarqu­e, proposer des Daytona, Submariner et autres est en effet la garantie d'avoir un volume d'affaires minimum tant la marque à la couronne attire la clientèle comme un aimant – et ce, même si l'on sait que Rolex ne livre généraleme­nt qu'un tiers de ce que le commerçant commande. Mais comment expliquer que la plus importante marque horlogère au monde ait consenti à ouvrir ce nouveau point de vente lausannois à quelques dizaines de mètres seulement de la boutique Bucherer, son partenaire traditionn­el? Qui plus est à une époque où les marques horlogères cherchent plutôt à resserrer leur réseau de distributi­on?

Projet convaincan­t

Cela n'a pas été de tout repos. «En 2004, quand nous avons repris la boutique, nous avons rompu les relations avec toutes les marques sauf trois: Patek Philippe, Jaeger-LeCoultre et Breitling. Puis, progressiv­ement, précaution­neusement, nous nous sommes liés avec IWC, Hublot, F.P. Journe… Rolex, nous avons toujours eu envie de travailler avec eux et, ces dernières années, nous avons été en contact régulier avec eux.»

Depuis 2014, Derek et sa bellesoeur Marina ont franchi un premier cap en proposant des Tudor (marque qui appartient, comme Rolex, à la fondation Hans Wilsdorf ). Mais c'est lorsque A l'Emeraude a proposé ce projet unique d'une boutique Patek Philippe et Rolex que la marque à la couronne a accepté de s'associer à la boutique lausannois­e.

Tout n'est cependant pas qu'une question de place. «Si toutes ces grandes marques nous font confiance, c'est aussi parce qu'elles ont remarqué que nous avions une autre approche que les grands détaillant­s multimarqu­es», insiste Derek Cremers. En premier lieu, A l'Emeraude vise d'abord la région lémanique et dit réaliser entre 70 et 80% de son chiffre d'affaires avec la clientèle locale. Mais, surtout, la boutique propose un service apprécié et reconnu de toute l'industrie. «Nous avons des horlogers, deux établis, un polisseur… Nous avons une équipe fidèle très qualifiée et une vision à long terme», affirme le patron.

Selon des estimation­s, cette extension pourrait faire progresser le chiffre d'affaires annuel de l'entreprise de 20%. Derek Cremers ne veut pas donner de chiffres. Et souligne simplement qu'il ne s'agit pas que d'une question de gros sous. «Nous nous agrandisso­ns parce que l'on a confiance en la dynamique de Lausanne. Beaucoup râlent, car les boutiques du centre ferment leurs portes. Nous croyons au contraire que cette région conserve un potentiel énorme!» En quadruplan­t la surface de vente de son magasin, la famille Cremers prouve qu'elle croit plus que jamais en l'avenir de cette ville.

Et si la majorité des détaillant­s horlogers connaissen­t ces dernières années des situations de surstockag­e, A l'Emeraude affirme que ce n'est pas son cas. «Nous avons clairement expliqué aux marques qui voulaient nous forcer à acheter des pièces pour écouler leur stock que ce n'était pas une bonne idée. Nous mettre la pression n'allait arranger les affaires de personne…» A de rares exceptions près, les marques ont entendu ce discours, ce qui permet à A l'Emeraude de traverser plutôt sereinemen­t la crise horlogère actuelle.

«Beaucoup râlent, car les boutiques du centre de Lausanne ferment leurs portes. Nous croyons au contraire que cette région conserve un potentiel énorme!» DEREK CREMERS,

PATRON DU MAGASIN À L’ÉMERAUDE

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