L’équipe de Suisse mène à la mi-temps
Les hommes de Vladimir Petkovic ont un pied en Coupe du monde après leur victoire jeudi à Belfast, mais ils auraient tort de croire la partie finie contre des Nord-Irlandais révoltés par l’injustice du penalty qui a fait la différence. Match retour samedi
Le vert de l’espoir et de l’Irlande du Nord ne pâlira pas avant le coup de sifflet final du match retour des barrages, dimanche soir à Bâle. Mais en s’imposant jeudi à Belfast (0-1), l’équipe de Suisse de football a réalisé un peu plus de la moitié du chemin. Elle n’aura plus qu’à confirmer à domicile.
Devant les tribunes pleines du Parc Saint-Jacques, un nul lui suffira pour valider sa qualification pour la Coupe du monde 2018. Une défaite 0-1 entraînerait des prolongations puis une éventuelle séance de tirs au but. Pour renverser la vapeur en 90 minutes, la «Norn Iron» devrait marquer deux buts au moins, ce qu’elle n’a su faire à l’extérieur que contre la très modeste équipe de Saint-Marin dans le groupe C des éliminatoires. La presse britannique clame la formule en choeur: les Nord-Irlandais se retrouvent au pied d’une montagne (suisse, forcément) à gravir. En sandalettes, ajoutent les éditorialistes pessimistes.
Ascendant réel mais modeste
Pour la Nati, la situation paraît idéale. Grâce à un penalty qui n’avait pas lieu d’être sifflé mais qui le fut, elle a pris l’avantage. Ses sept joueurs sous la menace d’un avertissement synonyme de suspension pour le match retour sont restés sages malgré l’engagement de la rencontre. Manuel Akanji (22 ans) et Denis Zakaria (20) ont démontré avoir l’assurance nécessaire pour remplacer les patrons Johan Djourou (30) et Valon Behrami (32), blessés.
Les hommes de Vladimir Petkovic auraient pourtant tort de s’emballer: l’analyse de ces play-off n’aura de véritable pertinence qu’après 180 minutes de jeu. A Belfast, ils ont simplement réussi la première période attendue. Se relâcher pendant la mi-temps serait une erreur fatale, prévenait Stephan Lichtsteiner dans les entrailles du Windsor Park. «Oui, bien sûr, c’était important de gagner ici. Mais nous devons réaliser la même partie à Bâle, sinon cela n’aura servi à rien.»
L’ascendant pris est aussi réel que modeste. «Notre retard n’est pas insurmontable, notait le gardien nord-irlandais Michael McGovern. Si nous inscrivons un but rapidement dimanche, il y aura 1-1 et nos chances seront à nouveau totales.» Constat partagé par Vladimir Petkovic: «Avec leur style de jeu, nos adversaires sont capables de marquer sur n’importe quel long ballon, sur un corner ou même une touche. Le danger est encore bien là.»
Aux considérations pragmatiques s’ajoute une composante moins quantifiable mais primordiale: le fameux caractère des footballeurs nord-irlandais. L’injustice dont ils ont été victimes jeudi les conduira à redoubler de coeur pour obtenir réparation.
Pour éviter de trop s’exposer au danger, l’équipe de Suisse devra éviter de reproduire ce qu’elle a fait après le fameux penalty, lorsqu’elle a reculé tandis que les Nord-Irlandais, enfin, pointaient le bout de leur nez hors des remparts de leur forteresse défensive. Yann Sommer n’a jamais été mis à contribution (0 tir cadré), mais la menace s’est faite plus tangible. «Cela doit nous servir de leçon, a commenté Petkovic. Au Parc Saint-Jacques, le but sera de conserver le ballon le plus loin possible de notre cage.»
Rendement offensif en question
A Belfast, toutes les prévisions se sont révélées correctes. Le public: déchaîné pendant 90 minutes. Le temps: pluvieux. L’équipe d’Irlande du Nord: faible, mais difficile à manoeuvrer. Sa présence à ce stade des éliminatoires et ses résultats impressionnants à domicile incitaient à la plus grande considération, mais le match a jeté sur la sélection de Michael O’Neill une lumière crue. Au-delà des muscles de son fighting-spirit, son football ne compte que de maigres arguments.
Cette donnée est intégrée jusque par le très enthousiaste public. Alors que les supporters de la Nati font la fine bouche même en cas de victoire lorsque la manière n’y est pas, par exigence, les soldats de la Green and White Army exultent à chaque duel gagné, à chaque touche obtenue, à chaque contre lancé. Car ils connaissent les limites de leurs protégés. Avant l’ouverture du score, la domination de la Suisse n’a pas été moins hégémonique que contre la Lettonie ou les îles Féroé ces derniers mois.
La solidité défensive nord-irlandaise, par contre, ne souffre d’aucune remise en question. Sans l’erreur d’appréciation de l’arbitre Ovidiu Hategan qui a conduit au penalty, la cage de Michael McGovern serait restée inviolée. De quoi interroger une fois de plus le rendement offensif de l’équipe de Suisse.
Haris Seferovic a renfilé le costume d’attaquant en mal de réussite qu’il pensait avoir laissé en Allemagne lors de son transfert au Benfica Lisbonne cet été. Aucune action critique n’a germé dans l’axe, où l’état de forme de Blerim Dzemaili pâtit de la fin de saison précoce de son équipe en Amérique du Nord, et où Granit Xhaka excelle dans le rôle de chef d’orchestre qui oriente, moins dans celui de soliste qui distille la passe décisive.
«Mais à Bâle, les Nord-Irlandais devront aussi jouer de manière plus offensive pour revenir au score, positivait Xherdan Shaqiri. Cela va forcément nous ouvrir davantage d’espaces. Vraiment, la situation est parfaite pour nous.»
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«Avec leur style de jeu, nos adversaires sont capables de marquer sur n’importe quel long ballon, un corner ou même une touche. Le danger est encore bien là» VLADIMIR PETKOVIC, ENTRAÎNEUR DE LA NATI