A l’Europe de réinventer le solaire
Le 2 novembre dernier, l’entreprise suisse Meyer Burger a annoncé la délocalisation de son unité de production de panneaux photovoltaïques en Chine. Quelque 180 postes de travail seront sacrifiés à Thoune, dans le canton de Berne, mais ce transfert, selon son propre communiqué, lui permettra de garantir l’avenir du groupe. En Suisse comme en Europe, la messe est dite: la fabrication de panneaux solaires n’est plus une activité économique lucrative. En Allemagne, le dernier grand fabricant, SolarWorld, a tiré la prise en mai dernier.
Ce serait trop facile de désigner les fournisseurs chinois comme responsables. Certes, ces derniers, grâce à une main-d’oeuvre moins onéreuse et des subventions massives de Pékin, ont fini par faire main basse sur le marché mondial de panneaux solaires. Mais en Suisse comme en Europe, les deniers publics n’ont-ils pas également subventionné tant la fabrication que l’installation des panneaux solaires? La bonne nouvelle est que l’importation chinoise permettra aux Européens non seulement de consommer une énergie propre à moindre coût, mais aussi à des entreprises comme Meyer Burger d’améliorer leurs marges et surtout d’être présentes sur l’immense marché chinois et asiatique.
Elles sont nombreuses les entreprises européennes de services, notamment des installateurs, qui importent des panneaux photovoltaïques «made in China». Ceux-ci sont montés au créneau lorsqu’en 2013, l’Union européenne avait frappé les importations chinoises d’une taxe antidumping à hauteur de 47,7%, pour demander son annulation. Bruxelles a été contrainte à une pesée d’intérêts entre installateurs et constructeurs, et a fini par faire son choix. En février dernier, elle a annoncé la suppression graduelle de cette taxe sur une période de 18 mois. «Il ne fait aucun doute que nous avons le droit de protéger notre industrie, avait alors déclaré Frans Timmermans, le vice-président de la Commission. Mais il nous faut aussi prendre en compte les autres entreprises qui importent ces produits. Ces sociétés emploient des milliers de personnes à travers l’Europe et sont essentielles pour que l’Union remplisse ses objectifs environnementaux.»
La délocalisation de la production des panneaux solaires en Chine participe de la désindustrialisation de l’Europe. Soit. Mais c’est aussi une opportunité pour les Européens d’investir dans l’innovation en matière d’énergie solaire. Les nouvelles ne sont pas mauvaises sur ce front. Les Suisses ont déjà fait des grands pas, notamment en intégrant des cellules photovoltaïques directement dans les matériaux de construction. Plusieurs projets pilotes sont en cours dans le pays. Sur le plan européen, un rapport publié la semaine passée par SolarPower Europe, organisation faîtière de cette industrie, affirme que le nombre d’emplois en Europe devrait atteindre 175000, dont 120000 nouvelles places de travail, en 2021, pour un chiffre d’affaires de 9,5 milliards d’euros.
Désormais, il s’agit de ne pas être dépassé par d’autres acteurs. Comme Tesla d’Elon Musk, qui a promis quatre modèles de tuiles photovoltaïques pour l’année prochaine.
Ce serait trop facile de désigner les Chinois comme coupables