S’il te plaît… dessine-moi un banquier!
Tsunami réglementaire, exigences d’une clientèle toujours plus avertie, environnement de taux très faibles, bouleversement numérique et concurrence accrue des fintechs: jamais la banque privée n’a été aussi chahutée. Dans ce contexte de mutations sans précédent, un banquier nouveau émerge. Il est transparent, proactif, didactique et au bénéfice d’une technicité sans faille.
Souffles résiduels de l’ouragan réglementaire, Mifid 2 et son équivalent suisse LSFin visent à protéger les consommateurs en exigeant la communication détaillée de la structure de rémunération de la banque. Cette complète transparence implique un basculement radical du modèle d’affaires fondé sur une rémunération liée aux produits vendus ou aux transactions effectuées, vers un modèle où la rétribution dépend du service fourni. Or l’évaluation de la qualité de ce dernier repose en grande partie sur des éléments difficiles à quantifier parce que éminemment subjectifs.
Doutes sur la tarification?
Dans ce contexte, comment le client peut-il s’assurer que la tarification du service qui lui est proposé correspond bien à la valeur de la prestation délivrée?
Seule une «due diligence» approfondie, telle que pratiquée par les institutionnels, peut permettre d’aboutir à des résultats fiables. Tous les clients n’étant pas en mesure de pratiquer une telle analyse, il incombe aux banquiers de définir une tarification claire et transparente correspondant à une proposition de valeur précise. La différenciation entre établissements se fera ensuite sur la base de deux critères essentiels: la connaissance du client et l’expertise mise en oeuvre. Connaître son client constitue d’abord une exigence réglementaire. Depuis quelques années, la Finma exige que chaque établissement élabore un profil de risque très détaillé de chaque client. Aussi la plupart d’entre eux ont-ils développé leurs propres questionnaires de manière à préciser les objectifs du client, son niveau d’expertise financière et le cadre dans lequel s’effectuera la gestion. Mais cette contrainte ne représente que le premier pas d’un dialogue qui, pour se distinguer, devra être alimenté par le banquier.
L’apport de la numérisation
Grâce à la digitalisation, ce type de dialogue gagne en rapidité et en capacité à couvrir une vaste palette d’opportunités potentielles et cela de manière systématique. Cette couverture étendue de l’univers d’investissement devient décisive à un moment où l’allocation d’actifs retrouve ses lettres de noblesse. Car la prise de conscience que 80% de la performance d’un portefeuille dépend de cette allocation implique la nécessité d’une vision globale. Cette dernière est d’autant plus importante que la clientèle demande de prendre en compte dans l’analyse de sa situation tous les éléments de son patrimoine, y compris les moins liquides tels que l’immobilier, l’art ou encore ses fondations philanthropiques.
Or les nouvelles solutions digitales permettent
Le siège de la Société Générale, à Paris.
Il incombe aux banquiers de définir une tarification claire et transparente correspondant à une proposition de valeur précise
précisément d’intégrer de multiples données et de procéder à des études de scénarios, et ce, de manière très simple et compréhensible. A l’heure où sur les marchés l’improbable et la surprise deviennent la nouvelle norme, la capacité à intégrer les événements extrêmes dans les scénarios est particulièrement appréciée. Globalement, la digitalisation permet d’enrichir le dialogue et de le libérer de contraintes temporelles ou géographiques. Elle favorise également une systématique qui permet de traiter un nombre beaucoup plus important de clients tout en améliorant la qualité du service. Aussi, les établissements qui disposent de tels outils et sont en mesure de les adapter aux besoins différenciés de leur clientèle possèdent un avantage compétitif non négligeable.
L’apport de l’expertise technique
L’expertise technique représente un deuxième facteur de différenciation majeur, particulièrement dans le contexte de taux actuels, où il devient de plus en plus difficile de servir aux clients les rendements historiques auxquels ils étaient habitués. A titre d’illustration, la performance, le service et l’innovation sur les produits structurés et dérivés permettent de trouver les solutions les mieux adaptées aux besoins d’individualisation des clients et d’optimiser le rendement de leur portefeuille. Autre exemple, une expertise sur le crédit constitue également un élément de l’offre très apprécié, que ce soit pour la structuration du financement ou de la monétisation des biens immobiliers (crédit hypothécaire) ou encore la possibilité d’utiliser du levier dans les portefeuilles (crédit lombard).
L’époque de la «banque à papa» est définitivement révolue. Les nouveaux banquiers se doivent d’être entreprenants, prompts à s’approprier les nouveaux outils digitaux et capables de proposer des solutions d’investissement innovantes dans un environnement caractérisé par un degré élevé d’incertitude. Jamais le métier n’a été aussi passionnant. Le banquier n’est plus un tailleur de pierre, c’est un bâtisseur de cathédrales.
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