Le nombre de millionnaires augmente
Un rapport de Credit Suisse montre que la fortune mondiale a augmenté plus rapidement cette année que l’année précédente, tirée par une croissance de la richesse aux Etats-Unis. La génération Y est la première à s’en sortir moins bien que ses parents
Les Etats-Unis ne sont pas près de céder leur place au sommet du podium de la richesse mondiale. Selon le dernier rapport sur la fortune mondiale de l'Institut de recherche de Credit Suisse, présenté mardi à Zurich, les habitants de la première économie du monde ont vu leur fortune gonfler de 8500 milliards de dollars, soit une hausse de 10,1%, au cours des douze mois se terminant en juin dernier. Pas moins de 43% des millionnaires que compte la planète se trouvent outre-Atlantique.
Les Etats-Unis sont suivis par la Chine, qui a accumulé 1700 milliards supplémentaires. Dans le monde entier, la richesse a augmenté plus rapidement au cours de l'année écoulée que pendant les douze mois précédents, notamment en raison de la bonne tenue de marchés actions, mais aussi de la hausse des actifs non financiers (immobilier notamment). La richesse mondiale a ainsi augmenté de 6,4% à 280000 milliards. Soit 56540 dollars par habitant adulte de la planète, en moyenne. «Un record qui masque des variations considérables à travers les pays et les régions», souligne toutefois le rapport.
Les Suisses riches en moyenne
L'Occident domine toujours. L'Amérique du Nord et l'Europe comptent ensemble pour 64% de la richesse mondiale des ménages, alors que les deux continents n'abritent que 17% de la population adulte mondiale. Cependant, le premier creuse l'écart: alors que les deux régions affichaient une proportion identique il y a quelques années, l'Amérique du Nord représente désormais 36% de la richesse mondiale, contre 28% pour le Vieux Continent.
La Suisse loge 2% des millionnaires de la planète, mais surtout, la fortune moyenne est la plus élevée au monde (537600 dollars), suivie par l'Australie (402600 dollars) et les Etats-Unis (388600 dollars). Il suffit de prendre la médiane (niveau où l'on trouve autant de personnes ayant une fortune plus faible que de personnes en ayant une plus élevée) pour avoir un début d'idée des écarts: elle atteint 229000 dollars en Suisse, 195400 en Australie, qui restent les deux premiers, tandis que les Etats-Unis tombent au 21e rang avec 55900 dollars par habitant, révèle l'étude.
De façon générale, «malgré une fortune moyenne supérieure par adulte, la fortune médiane a de nouveau reculé cette année en Afrique, en Asie-Pacifique et en Amérique latine. Les projections jusqu'en 2022 suggèrent des scénarios plus pessimistes pour les années à venir», prévient l'étude. «Les inégalités ont augmenté, notamment en raison de la hausse des actifs financiers et du dollar», a précisé Anthony Shorrocks, économiste du développement et l'un des auteurs du rapport. La moitié des adultes que compte le globe détient 1% de la fortune totale, tandis que les 10% les mieux lotis en détiennent 88% et les 1% les plus riches la moitié. Au total, 3,5 milliards de personnes (70% de la population adulte) détiennent moins de 10000 dollars.
Défis pour les plus jeunes
Une situation, s'alarme l'étude, qui se retrouve de façon «disproportionnée» parmi les jeunes. Certes, ils ont eu moins de temps pour accumuler des réserves, mais les conditions auxquelles fait face la génération Y (née entre 1980 et 2000) sont particulièrement inquiétantes, ajoutent les experts. «Avec les baby-boomers qui occupent les meilleurs jobs et la plupart des habitations, les millennials s'en sortent moins bien que leurs parents au même âge.»
Plus surprenant, «l'entrepreneuriat décline parmi les pays de l'OCDE, même dans cette génération généralement louée comme une génération d'entrepreneurs». A cela s'ajoute une autre préoccupation: la reprise est non seulement plutôt molle depuis la crise financière, mais, en plus, elle ne profite pas à tous. «Les chiffres de notre base de données de la richesse soutiennent ce point de vue», souligne le rapport.
En Suisse, l'étude note une hausse de 130% de la fortune depuis le tournant du millénaire, aidée notamment par l'appréciation du franc, puisque les comparaisons se font en dollars. Mais même sans le coup de pouce de la monnaie, les ménages ont vu leurs économies augmenter de 35% sur cette période.
Les deux tiers des résidents comptent des actifs d'au moins 100000 dollars et 8,8% des Suisses sont millionnaires en dollars. Ce sont aussi les plus endettés (140500 dollars, en moyenne), «l'un des niveaux absolus parmi les plus élevés du monde, même si nous continuons à penser que le ratio de dette reflète le haut niveau de développement financier du pays, plutôt qu'un excès d'endettement», précise Urs Rohner, président de Credit Suisse dans l'introduction.
Les auteurs ajoutent que la Suisse n'a pas vu de réduction des inégalités «depuis un siècle». Les chiffres étant basés sur les citoyens d'un pays, «il est probable que les inégalités apparaissent encore plus importantes si on se basait sur les résidents suisses», a ajouté Anthony Shorrocks, en référence aux nombreux millionnaires étrangers vivant en Suisse.
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Avec les babyboomers qui occupent les meilleurs jobs et la plupart des habitations, les «millennials» s’en sortent moins bien que leurs parents au même âge