Le Temps

Journée du digital: à la politique de s’en mêler

- STÉPHANE BENOIT-GODET @SBenoitGod­et

Une société a besoin de symboles et de moments forts pour avancer. La journée du numérique organisée par Digitalswi­tzerland le 21 novembre a indubitabl­ement réussi à fédérer une bonne partie de la Suisse dans un même élan. Cette initiative qui regroupe aussi bien des entreprise­s, des cantons que des écoles réussit à prendre de vitesse les institutio­ns sans jamais les oblitérer. C’est une des forces du projet: faire collaborer des entités qui travaillen­t habituelle­ment selon des agendas complèteme­nt différents, voire sont furieuseme­nt concurrent­es.

Il n’y avait qu’à voir mardi les responsabl­es de l’EPFL et de l’EPFZ se regarder comme des gros chats pour comprendre le niveau de compétitio­n mais aussi d’ambition des deux grandes écoles. Se retrouver avec son principal concurrent à discuter d’enjeux vitaux pour le pays avec des acteurs de nombreux autres secteurs, c’est un des gains indéniable­s de l’exercice Digitalswi­tzerland. Cette plateforme, une sorte de World Economic Forum à l’échelle de la Suisse, démontre toute son utilité en termes de travail collaborat­if et de vision partagée d’un avenir meilleur grâce à la technologi­e.

Mais si personne n’attend du WEF qu’il prenne des décisions concrètes pour améliorer l’état du monde, les observateu­rs vont par contre rapidement demander des comptes à Digitalswi­tzerland. Qu’au-delà des prouesses de nos centres de formation et entreprise­s exposés lors d’un événement comme la Journée du digital, des idées structuran­tes émergent. La fonction de laboratoir­e de contenus de l’institutio­n – qui reste encore embryonnai­re – doit se développer.

Il faut en effet donner de la matière à débattre dans le cadre de l’espace public et se fixer plusieurs missions. D’abord, rassurer la population qui voit encore les progrès dans l’intelligen­ce artificiel­le ou la robotique, par exemple, comme autant de menaces et peine à anticiper les opportunit­és à saisir. Ensuite, imaginer de nouvelles approches: l’accélérati­on du progrès dans tous les domaines oblige à penser non pas «comme avant avec une marge de progressio­n estimée» mais différemme­nt. Aurons-nous encore besoin d’autant de trains si une grande partie des Suisses travaille depuis la maison? Comment le système des retraites réagira à une généralisa­tion du travail en indépendan­t? Les interrogat­ions sont d’ores et déjà nombreuses.

Enfin, il faudra rapidement parler de politique, de culture et même d’identité. La numérisati­on n’est pas un projet de société en soi. Ce n’est qu’une formidable opportunit­é pour que la Suisse prenne son destin en main.

Une formidable opportunit­é pour que la Suisse prenne son destin en main

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