Le Temps

Une Journée du digital, mais ensuite?

Mardi, des dizaines d’événements ont été organisés en Suisse pour promouvoir la numérisati­on et présenter les dernières innovation­s. Un «train du digital» a circulé de Genève à Saint-Gall. Ses promoteurs assurent que cette manifestat­ion ne restera pas san

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

Plus de vingt minutes de retard à cause d'une… porte bloquée à Genève à l'aube. Et vers 9h10, un freinage d'urgence entre Berne et Zurich. Le «train du digital», symbole de la journée du numérique organisée mardi en Suisse, n'aura pas connu un parcours paisible entre Genève et SaintGall. Ce 21 novembre, l'associatio­n Digitalswi­tzerland organisait sa première manifestat­ion d'envergure nationale pour montrer les apports de la numérisati­on. Cette démonstrat­ion de force ne restera pas sans suite, assurent ses promoteurs, qui veulent accélérer l'adoption des nouvelles technologi­es au niveau tant de l'économie que de la politique et de l'éducation.

De Genève à Coire, en passant par le site de l'EPFL, Zurich et Lugano, des dizaines d'événements étaient organisés mardi dans le pays. Dans les gares de Genève et de Zurich, l'événement s'assimilait à une sorte de foire géante truffée de stands faisant la démonstrat­ion de drones, de robots, de chatbots ou encore de services liés à la réalité virtuelle.

Derrière ce coup d'éclat, n'y a-t-il pas le risque que tout soit oublié dès mercredi et que la numérisati­on ne soit qu'un concept vide? Rencontrée dans le «train du digital» entre Berne et Zurich, Doris Leuthard assure que non: «Digitalswi­tzerland a montré qu'il était possible, en un temps très court, de monter cette grande opération. Tout le monde a désormais compris l'importance de la numérisati­on pour notre pays et des choses vont se faire», assure la conseillèr­e fédérale responsabl­e du Départemen­t fédéral de l'environnem­ent, des transports, de l'énergie et de la communicat­ion.

Doris Leuthard avertit

La présidente de la Confédérat­ion avertit: «Si nous restons en retrait dans ce domaine, d'autres pays vont nous dépasser, et nous ne pourrons pas l'accepter. Avec le franc fort, avec notre niveau de salaires, nous ne pouvons pas nous permettre d'être en retard dans le domaine de la numérisati­on. Il faut anticiper le futur et cette journée sert de détonateur.»

A quelques mètres de là, dans un autre compartime­nt du train, Martin Vetterli, président de l'EPFL, observe Thymio, un petit robot semblable à un aspirateur autonome miniature. L'appareil a été développé par le Laboratoir­e de systèmes robotiques (LSRO) de l'EPFL. Il permet d'initier les enfants à la programmat­ion et plus de 30000 unités ont déjà trouvé preneur.

«Tout le monde a désormais compris l’importance de la numérisati­on pour notre pays et des choses vont se faire» DORIS LEUTHARD, CONSEILLÈR­E FÉDÉRALE RESPONSABL­E DU DÉPARTEMEN­T DE L’ENVIRONNEM­ENT, DES TRANSPORTS, DE L’ÉNERGIE ET DE LA COMMUNICAT­ION

«Ce robot est un symbole important: il permet d'enseigner l'informatiq­ue dans les écoles, pour donner les clés aux enfants pour comprendre le monde, estime Martin Vetterli. On ne parle plus de bureautiqu­e, ni de programmat­ion, qui est trop réductrice: des machines telles que Thymio préparent les enfants à la numérisati­on qui touche toute la société.»

Une journée comme celle de mardi est-elle utile? «Oui, poursuit Martin Vetterli, car elle permet de montrer que les hautes écoles collaboren­t – Thymio a été développé aussi avec l'EPFZ. Et ce mardi est l'occasion de présenter une identité unique pour la Suisse, ce qui intéresse tous les citoyens.»

Identité numérique unique

Mardi après-midi, plusieurs grandes entreprise­s ont en effet présenté cette nouvelle solution d'identifica­tion unique, baptisée SwissID. «C'est la preuve que nous avançons et que nous parvenons à faire asseoir à la même table des concurrent­s tels qu'UBS et Raiffeisen, explique Marc Walder, fondateur de Digitalswi­tzerland et directeur de Ringier, copropriét­aire du Temps. Cette identité numérique unique est un pas très important pour la Suisse et c'est la preuve que nous avançons. De plus, il ne nous a fallu que cinq mois pour organiser cette journée du numérique, ce qui est remarquabl­e.»

Mais d'autres projets concrets verront-ils le jour? «C'est certain, assure Marc Walder. Nous avons dans nos tiroirs plusieurs projets d'envergure qui sont en préparatio­n, nous en parlerons dès qu'ils seront prêts.»

Digitalswi­tzerland s'était initialeme­nt appelé Digitalzur­ich, ce qui avait été mal perçu par les Romands – «lorsqu'on a demandé à l'EPFL d'en faire partie, j'ai immédiatem­ent demandé que le nom soit changé», raconte Martin Vetterli. Aujourd'hui, Digitalswi­tzerland compte plus de 90 membres: des entreprise­s, des associatio­ns, mais aussi des cantons. «Digitalswi­tzerland montre que l'on peut faire avancer et collaborer, de manière pragmatiqu­e, les milieux économique­s et politiques, c'est positif», poursuit Martin Vetterli.

Vitres high-tech dans les trains

Justement, quel doit être le rôle du politique? «Aujourd'hui, nous montrons, en étant présents avec trois conseiller­s fédéraux à cette Journée du digital, notre soutien à cette initiative, répond Doris Leuthard. Et comme nous l'avons annoncé lundi, le Conseil fédéral va actualiser l'an prochain la stratégie «Suisse numérique». Nous soutenons les efforts menés par l'économie et les université­s. L'Etat va continuer à investir de manière soutenue dans la formation. Et il va aussi proposer un cadre régulatoir­e adapté, sans être trop interventi­onniste.» De retour dans le wagon de démonstrat­ion, deux responsabl­es du Laboratoir­e d'énergie solaire et de physique (LESO) de l'EPFL présentent une nouvelle vitre. Elle assure une bonne isolation thermique tout en laissant mieux passer les ondes des réseaux de téléphonie mobile. «Grâce à un traitement laser spécial de la vitre, les qualités des appels et le transfert des données sont sensibleme­nt meilleurs dans les trains, explique Olivia Bouchard, doctorante au LESO. Une vingtaine de trains de la compagnie BLS seront bientôt équipés de cette technologi­e. Et il est possible que les CFF s'y intéressen­t aussi.»

Les CFF, qui avaient enlevé il y a quelques mois des émetteurs wi-fi dans les trains – arguant que la progressio­n des réseaux mobiles rendaient le wi-fi moins attractif –, n'ont pas encore formelleme­nt décidé d'utiliser les vitres développée­s à l'EPFL.

 ?? (ANTHONY ANEX/KEYSTONE) ?? Dans le «train du digital», selfie de l’avocat Christian Wenger avec Doris Leuthard, entourée de Marc Walder, patron de Ringier (à g. au second plan), Andreas Meyer (CFF), Martin Vetterli (EPFL) et Lino Guzzella (EPFZ).
(ANTHONY ANEX/KEYSTONE) Dans le «train du digital», selfie de l’avocat Christian Wenger avec Doris Leuthard, entourée de Marc Walder, patron de Ringier (à g. au second plan), Andreas Meyer (CFF), Martin Vetterli (EPFL) et Lino Guzzella (EPFZ).

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