Le SPD sous pression pour participer au gouvernement
Le président de la République, Frank-Walter Steinmeier, sur qui repose la sortie de crise à Berlin, recevait hier le patron du SPD, Martin Schulz. Steinmeier cherche à convaincre les sociaux-démocrates de former un nouveau gouvernement avec la CDU d’Angel
C'est une lourde charge qui pèse sur les épaules de Frank-Walter Steinmeier. Le social-démocrate n'était pas le candidat favori d'Angela Merkel pour occuper le poste plutôt honorifique de président. Avec la crise politique historique que traverse l'Allemagne, la «chancelière-chargée-d'expédier-les-affaires-courantes» – tel est son nouveau titre – a toutes les raisons de se féliciter de la présence au château de Bellevue (le siège du président) d'un social-démocrate consensuel, doté d'influence sur le SPD, et qu'elle connaît bien pour l'avoir vu siéger dans son gouvernement pendant sept ans.
Mercredi, Frank-Walter Steinmeier recevait le patron du SPD, Martin Schulz, pour tenter de le convaincre d'accepter d'entamer des négociations avec la chancelière en vue de former le prochain gouvernement.
Repartir pour quatre ans de «GroKo»?
Conformément à la Constitution allemande, c'est au président de la République que revient la tâche de sortir l'Allemagne de la crise politique provoquée par l'interruption, dimanche, des discussions préliminaires en vue de former une majorité dite «Jamaïque» avec les chrétiens-démocrates, les Verts et les libéraux. Ces derniers avaient jeté l'éponge, évoquant un «manque de confiance» entre les partenaires potentiels. Près de neuf semaines après les élections, la situation semble sans issue: le président de la République, qui serait le seul à pouvoir les convoquer, refuse d'envisager de nouvelles élections, craignant une nouvelle poussée de l'extrême droite; Angela Merkel ne veut pas d'un gouvernement minoritaire; la direction des sociaux-démocrates refuse pour sa part de repartir pour quatre ans de GroKo, la «Grande Coalition» qui leur a permis de gouverner avec Angela Merkel à deux reprises, entre 2005 et 2009 puis depuis 2013.
Rien n'a filtré des entretiens de jeudi. Reste que la pression monte sur l'ancien président du Parlement européen. Le refus catégorique de Schulz de poursuivre la GroKo, énoncé dès 18h le soir du scrutin, le 24 septembre, est mal compris au sein du parti. En début de semaine, Schulz a reçu un accueil glacial de la part du groupe parlementaire SPD au Bundestag. Les sondages réalisés après la rupture des négociations créditent en effet son parti d'une nouvelle plongée, à moins de 20% des intentions de vote. Nombre de députés fraîchement élus ont de sérieuses raisons de s'inquiéter pour leur poste en cas de nouvelles élections.
Deux des trois courants représentés au sein du parti ont officiellement demandé cette semaine à la direction de faire preuve d'ouverture, et de tenter de profiter de la faiblesse relative d'Angela Merkel pour négocier un accord de coalition largement teinté des revendications sociales-démocrates.
«On ne peut pas se contenter de dire au président: «Désolé, c'est comme ça», estime notamment le député Johannes Kahrs, demandant à Schulz de «faire preuve d'ouverture d'esprit» lors de ses entretiens avec Steinmeier. Plusieurs poids lourds du parti, tels le ministre-président de Basse-Saxe, Stephan Weil, le maire de Hambourg, Olaf Scholz, le ministre sortant de la Justice, Heiko Maas, ainsi que le ministre des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, seraient favorables à une stratégie d'ouverture.
Le dilemme de Martin Schulz
Dans un entretien jeudi sur la chaîne ZDF, le numéro deux du SPD, Karl Lauterbach, a jugé lui aussi que son parti devait réexaminer sa position. Mais il s'est dit sceptique sur la possibilité de former une nouvelle coalition si Angela Merkel reste à la chancellerie.Martin Schulz se trouve désormais face au dilemme de perdre la face, en acceptant de négocier avec Merkel, ou de perdre son poste en misant sur de nouvelles élections. Responsable du pire score de l'histoire du SPD aux législatives du 24 septembre, il aurait peu de chances d'être reconduit à la tête de la liste du SPD.
Le président, Frank-Walter Steinmeier, refuse d’envisager de nouvelles élections, craignant une nouvelle poussée de l’extrême droite