Un remède contre les déficits qui ne convainc pas
Les mesures préconisées par le Conseil d’Etat mettent surtout à contribution les communes et les propriétaires. Le ministre des Finances, Serge Dal Busco, défend ses propositions, qui déplaisent à droite comme à gauche
Les députés du Grand Conseil genevois ne voyaient rien venir. Après la présentation du budget 2018, déficitaire de 164 millions de francs, le Conseil d’Etat devait leur soumettre le plan financier quadriennal et un plan d’assainissement. C’est chose faite. Et c’est la soupe à la grimace.
En substance, l’exécutif prévoit le retour à l’équilibre budgétaire à l’horizon 2021, grâce aux mesures déjà engagées en 2015, mais aussi à de nouvelles mesures, à parts égales entre recettes et économies, qui devraient améliorer le résultat d’environ 300 millions. Comment? Tout d’abord, il propose la contribution des communes au coût de la péréquation financière intercantonale, au prorata des revenus fiscaux qui leur reviennent. Ensuite, il s’agirait de faire passer les propriétaires à la caisse. En réévaluant le parc immobilier, l’Etat pourrait attendre une centaine de millions de recettes fiscales en plus. Quelques mesures structurelles sont aussi envisagées, concernant des prestations sociales jugées excessives. Enfin, une quarantaine de millions de francs d’économies sont attendues dans la fonction publique, pour l’heure tenues secrètes. Car le Conseil d’Etat en réserve la primeur à ses représentants, invités à en discuter.
«Un souci d’équilibre»
Ce plan déplaît à droite comme à gauche. Pour le PLR Cyril Aellen, «le Conseil d’Etat s’est contenté de reporter sur les communes, d’assommer les petits propriétaires de la droite laborieuse, de promettre des économies sans envergure basées sur des gains d’efficience qui devraient déjà être en place, et d’arracher quelques millions à la fonction publique, sans couper un poste!» Et le député de conclure: «Rémy Pagani n’aurait pas pu faire mieux.» Une colère que Serge Dal Busco ne comprend pas: «Ce plan ne se fait pas sur le dos des propriétaires, mais dans un souci constant d’équilibre. La dernière évaluation des immeubles datant de 1964, le droit fédéral nous impose de la refaire. Si on la faisait sans discernement, ce ne sont pas 100 millions que nous gagnerions, mais 212 millions. Or nous renonçons à la différence en proposant des mesures transitoires pour éviter à certains retraités des taxations exagérées, ainsi qu’une baisse de l’impôt sur la fortune. De 1% aujourd’hui, le taux le plus élevé de Suisse, il passerait à 0,7%, pour s’aligner sur celui du canton de Vaud.»
Un «plan d’austérité»
Alors que la gauche devrait être emballée sur la réévaluation immobilière, elle n’en fait aucune mention et préfère parler d’un plan d’austérité. Le parti socialiste fustige l’effort demandé aux communes, qui n’avaient pas besoin de cela en plus de la réforme de l’imposition des entreprises. «La charge du canton augmente de 40 millions en raison d’une opération fiscale exceptionnelle qui a rapporté 120 millions à une commune, il est donc bien logique que les communes supportent une partie du coût de la péréquation», répond Serge Dal Busco. Le PS déplore aussi les sacrifices réclamés à la fonction publique, déjà menacée par le nouveau système de grille salariale et la recapitalisation de sa caisse de pension.
Si le député socialiste Roger Deneys juge certaines mesures équilibrées, il estime toutefois que «le Conseil d’Etat nous vend un retour à l’équilibre comme si PF17 (ndlr: le nouveau projet d’imposition des entreprises) n’existait pas. Mais il existe! Et même, il pèse pour 350 millions de francs la première année.» Réponse de Serge Dal Busco: «Il y aura 350 millions initialement manquants, j’en conviens. Mais les effets dynamiques vont permettre de récupérer cet argent au bout de cinq ans, comme l’indique l’une des lois du paquet fiscal qui a été déposé par le Conseil d’Etat. Si on parvient à mettre en oeuvre ce plan financier quadriennal avec le Grand Conseil, on absorbera les effets des lois de la CPEG, de Score et de PF17 en 2021.» Mais l’enjeu immédiat se jouera dans quinze jours, quand le Grand Conseil se prononcera sur le budget.n