Factory 2, nouveau campus pour les start-up berlinoises
Les locaux de l’ancienne usine Agfa accueilleront bientôt des créateurs indépendants qui profiteront d’infrastructures fastueuses.
Au coeur de Berlin, dans l’enceinte d’une ancienne usine d’Agfa, les ouvriers travaillent aux derniers préparatifs de l’un des plus grands campus de start-up d’Europe. Le bâtiment de brique et d’acier, somptueux, abrite déjà une université dédiée aux créateurs de jeunes pousses
Quels étudiants peuvent se targuer d’apprendre dans de telles conditions? Christoph Janke, 21 ans, jeans et pull gris, sac à dos noir sous le bras, prend place sur un petit crapaud gris perle face au monumental canapé de velours marbré qui trône à proximité d’un mur végétal de plantes stabilisées. Dans son dos, une interminable banquette de chêne clair, ponctuée de coussins, à même de recevoir plusieurs dizaines de personnes, et quelques curieux fauteuils-coques décorés de feuilles de cuivre. Nous sommes dans le café de Factory 2, le campus en gestation de l’un des plus grands centres de start-up d’Europe. Christoph Janke est l’un des 88 étudiants de la Code University, une université privée réservée aux futurs fondateurs de start-up, implantée depuis octobre dans le cadre prestigieux de Factory 2.
Christoph Janke est rapidement rejoint par Thomas Bachem. Allure juvénile, col roulé gris et jeans, baskets aux pieds, à 31 ans celui-ci pourrait passer pour l’un des étudiants de la Code University. Il en est le fondateur. A son actif, Thomas Bachem a derrière lui la fondation de plusieurs start-up à succès, telle la plateforme vidéo Sevenload, rachetée par l’éditeur Burda, ou la plateforme Lebenslauf.com, une aide à la rédaction de curriculum vitae cédée voici trois ans à Xing. Originaire de Cologne, le jeune millionnaire a appris la programmation tout seul, à l’âge de 12 ans, et renoncé à un cursus classique d’informatique à l’université – jugé trop théorique – au profit d’études d’économie. Avec la Code University, il réalise l’un de ses rêves: ouvrir une université de programmation axée sur la formation pratique, une université qui dispense la formation qu’il aurait aimé recevoir.
Déficit en spécialistes informatiques
Près de 45% des étudiants allemands inscrits en informatique interrompent leurs études avant l’obtention de leur diplôme. Souvent par lassitude envers une formation trop axée sur les mathématiques au détriment de la programmation. A la Code University, la vie des étudiants n’est pas rythmée par les cours magistraux, les séminaires et les examens mais par la réalisation de projets individuels ou par équipe. Le projet est financé par Thomas Bachem, avec le soutien de parrains tels que les fondateurs de Trivago, Wunderlist ou Bigpoint. Le coût de la scolarité – 27000 euros pour trois ans et un bachelor – sera reversé par les étudiants avec leur premier salaire. Chacun des 88 élus de la première promotion s’est engagé à verser 6,5% de son premier salaire à la Code University, sur une durée de dix ans. Leur recherche d’emploi ne sera guère ardue: le pays compte un déficit en spécialistes informatiques de 50000 personnes, selon la fédération de la branche, Bitkom.
Triés sur le volet, les 88 heureux élus ont été sélectionnés parmi quelque 450 candidatures. Tous avaient entendu parler du projet via les réseaux sociaux. Thomas Bachem a longtemps hésité entre Cologne et Berlin pour son projet. «Cologne a l’avantage d’offrir un bassin de population considérable, explique le jeune recteur. Mais Berlin est la ville des start-up en Allemagne et a un contexte international très développé.» 20% de ses étudiants ne sont pas Allemands. Les cours se déroulent en anglais.
Les étudiants de la Code University ne seront bientôt plus seuls à occuper l’ancienne usine Agfa. Les cinq étages et 15000 mètres carrés de briques, de verre et d’acier de ce bâtiment en bordure du quartier branché de Kreuzberg accueilleront à partir de janvier – après la fin des travaux – un millier de créatifs venus du monde entier. «Ce sera le plus grand «clubhaus» de start-up d’Europe», assure le président de Factory, Lukas Kampfmann.
Créatifs du monde entier
Pour 50 euros par mois, les créateurs indépendants pourront utiliser tables de travail, Internet, café à volonté, cabines de discussion rose bonbon ou vert pomme, imprimantes 3D, construire leurs prototypes, se détendre dans la salle de yoga ou la baignoire à balles de 8 mètres cubes à lumière noire. «Les entreprises ne peuvent s’offrir ce genre de gadget qu’à partir de plusieurs centaines de salariés», rappelle le patron des lieux. Les start-up de plus de cinq salariés paieront, elles, un loyer de 1000 euros par mois.
Lukas Kampfmann n’en est pas à son coup d’essai. Cet ancien de l’immobilier gère déjà Factory 1, un centre pour start-up dans le quartier central de Mitte, visité par Emmanuel Macron à l’occasion d’un déplacement à Berlin, où la ville entendait présenter ce qu’elle fait de mieux en matière d’économie créative. SoundCloud ou la dépendance allemande d’Uber y ont installé leurs bureaux. Deutsche Bank ou l’assureur Ergo y font travailler quelques salariés, chargés d’établir le contact avec des start-up triées sur le volet.
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