Le Temps

«L’école romande ne fait aucune discrimina­tion»

- PROPOS RECUEILLIS PAR M.-P. G.

Responsabl­e de l’enseigneme­nt spécialisé dans le canton de Vaud, Serge Loutan explique comment l’école inclusive est pratiquée en territoire romand depuis vingt ans

Le récit de Nathalie, relaté ci-contre, ne prêche pas en faveur du système scolaire romand. C’est un cas exceptionn­el, assure Serge Loutan, chef de l’enseigneme­nt spécialisé vaudois. En Suisse, la loi est très claire: le système scolaire accueille tous les élèves, quels que soient leur condition ou leur état. «En revanche, il se peut que la place d’un enfant plus fragile ne soit pas à l’école régulière, mais dans une institutio­n spécialisé­e qui répondra mieux à son besoin de protection et de soutien», explique le spécialist­e.

Dans son récit, Nathalie montre une grande disparité entre Genève et les Etats-Unis en matière d’accueil scolaire d’un élève handicapé. Comment expliquer cet écart? C’est sans doute un aiguillage qui ne s’est pas fait à un moment donné. Car à Genève, comme dans le canton de Vaud, aucun élève ne peut être ainsi laissé sur le carreau. Il existe des filières d’accueil et des outils pour aider ces enfants différents à se développer. Dans l’école régulière, si possible, ou en institutio­n, si le cas est trop lourd pour être intégré.

Ce qui frappe dans cette expérience, c’est la qualité d’équipement de cette école publique de Palo Alto pour accompagne­r des enfants en situation de handicap… Evidemment, quatre personnes pour gérer la différence dans une école traditionn­elle, c’est une aubaine. Mais, comme vous l’avez relevé, c’est aussi lié à l’ancrage géographiq­ue privilégié de cet établissem­ent, situé dans la Silicon Valley. En Suisse romande, l’école inclusive est également pratiquée avec de bons résultats. Il y a vingt ans, dans le canton de Vaud, 3,4% des enfants différents avec trouble ou déficience sévères étaient en institutio­n. Aujourd’hui, ce pourcentag­e est descendu à 2%, ce qui veut dire que de nombreux enfants fragilisés sont scolarisés dans l’école régulière, moyennant un accompagne­ment personnali­sé.

Une autre différence de taille réside dans la manière de communique­r en classe au sujet de la maladie. Nathalie a apprécié la transparen­ce en usage aux Etats-Unis, alors qu’à Genève, des parents d’élèves pensaient parfois que son fils était contagieux… Quelle est la politique des écoles romandes? Il n’y a pas de protocole unique. L’informatio­n dépend des désirs de l’enfant, de ses parents et des enseignant­s. C’est possible que, par souci de discrétion et par crainte de stigmatisa­tion, nos pratiques soient moins transparen­tes que celles de nos confrères américains, mais là encore, chaque cas impose sa loi.

Et sur la moquerie, les regards qui blessent? Les Etats-Unis pratiquent la tolérance zéro. Quelle est votre position à ce sujet? Le respect est une de nos priorités. Et pas qu’en matière de maladie et de handicap. Egalement sur les questions de genre, d’orientatio­n sexuelle, de confession religieuse ou de racisme. On travaille beaucoup à doter les établissem­ents d’outils de repérage et d’intégratio­n. Concernant le handicap, nous avons observé qu’une déficience physique était mieux gérée par le groupe qu’un trouble psychologi­que du type autisme. Mais globalemen­t, la présence d’un enfant différent est très bénéfique à l’ensemble des élèves qui, de manière générale, sont compatissa­nts.

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