Le Temps

Nyon justifie sa procédure de naturalisa­tion

- LAURE LUGON ZUGRAVU @LaureLugon

Après les deux témoignage­s du «Temps» sur les faiseurs de Suisse, la commune défend son système. Elle a mis en place un cadre étroit censé éviter l’arbitraire qui a prévalu par le passé

Nyon estime avoir tout juste dans la procédure d’audition des candidats à la naturalisa­tion. C’est la position qu’elle a affichée au cours d’une conférence de presse, organisée à la suite de deux témoignage­s relayés par Le Temps. Il s’agissait de deux candidats recalés, un secondo italien de 45 ans né à Genève et une Française de 29 ans arrivée adolescent­e en Suisse. L’intégratio­n évidente et la maîtrise d’une respective­ment de deux langues nationales n’avaient pas suffi aux examinateu­rs de la commission, estimant rédhibitoi­res les lacunes théoriques des candidats: «Il ne suffit pas d’avoir vécu ici ou d’avoir travaillé à Paléo, il faut encore avoir des connaissan­ces de géographie et de civisme suffisante­s», a réitéré Stéphanie Schmutz, présidente de la Commission des naturalisa­tions, s’en remet- tant à la jurisprude­nce de la Cour de droit administra­tif et public (CDAP) du canton.

«Pas le bon échelon»

«Le débat lancé par Le Temps nous a interpellé­s, s’agissant, pour l’un, d’une personne qui vit en Suisse depuis quarante-cinq ans, admet Stéphanie Schmutz. Mais le débat n’est pas placé au bon échelon. Il est d’ordre fédéral et cantonal, car la loi demande aux communes de mettre en place ces auditions.» Certes, mais la marge de manoeuvre des communes est large, et Nyon en fait la démonstrat­ion avec la mise en place d’un cadre contraigna­nt censé éviter l’arbitraire: «Nous avons édité un guide pour les commissair­es, où nous cadrons le déroulemen­t des auditions et listons les questions à poser», déclare Pierre-François Umiglia, secrétaire municipal. Depuis 2017, quatre personnes formées suivent les candidats individuel­lement. Nyon se félicite aussi d’avoir édité une brochure contenant les notions d’histoire, de civisme et de géographie requises. Elle propose encore des ateliers de travail sur ces thèmes, menés par Caritas. «Cela rassure les candidats», dit Christiane Piazzini, déléguée à l’intégratio­n. Les deux recalés n’avaient évidemment pas suivi ces ateliers, estimant que leur parcours, leur intégratio­n et leur langue maternelle parlaient pour eux. Très bien, mais pas suffisant, dit la commune: «La loi dit que l’intégratio­n passe aussi par une connaissan­ce suffisante du civisme.» Quel est le barème établi par la commission? «On ne met pas des coches «juste» ou «faux», répond Stéphanie Schmutz. On évalue la manière dont les gens ont répondu et les décisions de recaler un candidat se prennent à l’unanimité.»

Selon le document confidenti­el que les journalist­es ont pu consulter, l’entretien doit tourner d’abord autour de questions personnell­es sur le parcours et l’intégratio­n des candidats. Or, dans les deux cas mis en lumière par Le Temps, il n’en a quasiment pas été question. Et pour cause. Il y a quelques années, certains membres du Conseil communal avaient commis des dérapages: «Ils induisaien­t une inégalité de traitement en fonction de l’origine des personnes ou des questions personnell­es posées, et j’y allais avec la boule au ventre», atteste Stéphanie Schmutz. De 2014 à 2016, ils avaient même été jusqu’à refuser de siéger, considéran­t que le municipal était trop laxiste dans l’octroi de la bourgeoisi­e. Depuis, l’exécutif a recadré les choses. «Il est vrai que nous pourrions nous passer d’eux, note Stéphanie Schmutz, mais se répartir cette tâche à six, cela fait beaucoup.» N’aurait-il pas fallu au moins un coup de sac au sein de cette commission? «La municipali­té a décidé que non. Mais désormais, ils jouent le jeu et remplissen­t leur rôle avec engagement.»

Sur 424 dossiers de candidatur­e en six ans, 329 bourgeoisi­es nyonnaises ont été octroyées. La grande majorité des personnes refusées l’ont été sur la base de leur dossier, avant audition. Parmi les recalés à l’audition, seules 14 personnes ne se sont pas représenté­es à l’examen.

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