Le Temps

«Alliées, Genève et Zurich seront plus fortes»

Les Université­s de Genève et Zurich annoncent un partenaria­t stratégiqu­e. Le but sera de créer des projets de recherche ensemble, de favoriser les échanges entre étudiants et d’être plus fortes au niveau européen. Interview croisée de leurs deux recteurs

- PROPOS RECUEILLIS PAR ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

Les Université­s de Genève et Zurich veulent élaborer des projets de recherche ensemble, favoriser la mobilité des étudiants entre les deux villes et réfléchir conjointem­ent aux conséquenc­es de la numérisati­on dans le cadre d'un futur «Digital Society Policy Institute» à créer. Interview croisée d'Yves Flückiger, recteur de l'Université de Genève, et de Michael Hengartner, recteur de l'Université de Zurich.

Pourquoi lancer ce partenaria­t stratégiqu­e?

Yves Flückiger: Des partenaria­ts avec des université­s, Genève et Zurich en ont avec des centaines au niveau mondial. Mais notre alliance avec Zurich va beaucoup plus loin. Nos deux université­s sont en tête des classement­s mondiaux, dont celui de Nature avec son indice de l'innovation. Nous avons déjà de nombreux projets de recherche avec Zurich. Mais, alliées, Genève et Zurich seront plus fortes: pour nos étudiants, pour la recherche et surtout pour notre contributi­on à la Suisse.

Michael Hengartner: Au niveau mondial, nous avons déjà plusieurs alliances stratégiqu­es. Nous avons beaucoup réfléchi après le vote du 9 février 2014 sur l'immigratio­n. Et nous nous sommes rendu compte qu'il n'était pas toujours nécessaire d'aller chercher loin à l'étranger et que l'excellence se trouvait à 3 heures de train. Nous voulons aussi contribuer à la cohésion nationale.

Quels sont vos projets dans le domaine numérique?

M. H.: La numérisati­on bouleverse l'ensemble de la société et nous l'étudions du point de vue politique, économique, personnel, humaniste ou encore juridique. Il faut aussi y réfléchir du point de vue technique, ce que font très bien l'EPFL et l'EPFZ. Mais il faut avoir une vision plus globale, et les université­s pluridisci­plinaires ont beaucoup à apporter dans ce domaine.

Y. F.: La Suisse est un peu en retard dans le domaine de la numérisati­on, mais ses implicatio­ns seront immenses. Pensez simplement aux conséquenc­es de la robotisati­on, qui pourrait faire disparaîtr­e des millions d'emplois. Mais combien? Et si des emplois disparaiss­ent, comment financer l'Etat social qui repose aujourd'hui largement sur des cotisation­s salariales? Ces questions sont fondamenta­les. Et la numérisati­on touche aussi de près nos étudiants: comment leur enseigner le droit ou faut-il encore une spécialisa­tion en radiologie, alors que l'intelligen­ce artificiel­le bouleverse tout, et très rapidement?

Avec votre partenaria­t bilatéral, ne risquez-vous pas de fâcher d’autres université­s suisses, voire l’EPFL et l’EPFZ?

Y. F.: Pas du tout, notre approche est très complément­aire de celle des écoles polytechni­ques fédérales. Nous avons des liens étroits avec l'EPFL dans le cadre du Campus Biotech, mais aussi avec les Université­s de Lausanne et Neuchâtel via le «Triangle azur». Nous collaboron­s aussi depuis 2004 avec Lausanne pour la pharmacie. Le partenaria­t fort avec Zurich ne va pas freiner ces collaborat­ions lémaniques, mais au contraire les renforcer grâce à un nouvel axe de coopératio­n.

M. H.: Notre collaborat­ion intense avec l'EPFZ va se poursuivre, c'est une évidence. Mais, encore une fois, les approches sont différente­s, l'école polytechni­que est extrêmemen­t forte au niveau de certaines sciences dites dures, notre vision est plus globale.

Quelles sont les ressources allouées à votre partenaria­t?

Y. F.: D'habitude, les partenaria­ts stratégiqu­es que nous avons avec une dizaine d'université­s étrangères se traduisent par un apport de 50000 euros ou dollars de la part de chaque partenaire. Là, Genève et Zurich mettent 200000 francs chacune. Cela permettra d'identifier les projets de recherche communs, d'en créer de nouveaux et pourquoi pas, ensuite, de décrocher des financemen­ts européens. Nous allons mettre en place une dynamique vertueuse, qui profitera à l'ensemble de la Suisse, c'est très important.

Pensez-vous vraiment que la mobilité des étudiants entre Genève et Zurich sera accrue?

M. H.: Il y a déjà des échanges importants entre les deux université­s, et je pense qu'ils s'accroîtron­t. Partir à l'étranger, c'est très important. Mais se perfection­ner en allemand ou en français dans des domaines pointus, c'est capital pour sa carrière.

Y. F.: Aujourd'hui, Zurich est la première destinatio­n suisse choisie par nos étudiants. En leur offrant de nouvelles perspectiv­es de formation, telles que des diplômes conjoints, la mobilité s'accroîtra.

«Le partenaria­t fort avec Zurich ne va pas freiner les collaborat­ions lémaniques, mais au contraire les renforcer» YVES FLÜCKIGER,

RECTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE GENÈVE

 ?? (BÉATRICE DEVÈNES) ?? Pour les recteur des Université­s de Zurich, Michael Hengartner (à gauche), et de Genève, Yves Flückiger, le partenaria­t permettra d’intensifie­r les échanges d’étudiants entre les deux alma mater.
(BÉATRICE DEVÈNES) Pour les recteur des Université­s de Zurich, Michael Hengartner (à gauche), et de Genève, Yves Flückiger, le partenaria­t permettra d’intensifie­r les échanges d’étudiants entre les deux alma mater.

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