Le Temps

La vieille droite latino-américaine

- SIMON PETITE @SimonPetit­e

Le retour au pouvoir de Sebastian Piñera au Chili confirme le tournant à droite du continent. L’ère ouverte par la victoire électorale d’Hugo Chavez au Venezuela en 1999 est définitive­ment révolue.

Les derniers héritiers du charismati­que leader vénézuélie­n font une bien mauvaise publicité à la gauche de gouverneme­nt. A Caracas, Nicolas Maduro est la caricature du caudillo latino-américain. En Bolivie, Evo Morales est sur le point de succomber à la tentation de prolonger son bail à la tête de son pays. Sans parler de l’inamovible leader sandiniste Daniel Ortega au Nicaragua et de la famille Castro, même si Cuba a entamé une timide ouverture.

La présidente chilienne sortante, Michelle Bachelet, elle, se réclamait de l’autre gauche latino-américaine, son aile réformiste incarnée par l’ancien président brésilien Lula. Le syndicalis­te avait cédé la place à sa dauphine Dilma Rousseff, ensuite destituée dans des conditions douteuses par la droite brésilienn­e, désormais incapable de sortir le pays de la crise et tout aussi contaminée par les affaires de corruption.

Le seul élément réjouissan­t dans ce retour de balancier latino-américain est qu’il marque une alternance, quoique cette vertu soit à géométrie variable, comme le montre la réélection contestée du président hondurien conservate­ur, Juan Orlando Hernandez.

Certains verront aussi dans ce recul de la gauche l’effet de l’effondreme­nt du prix des matières premières et de la crise du modèle de redistribu­tion bâti par le Brésil ou le Venezuela. Ce serait oublier que chaque pays a ses spécificit­és. Il est, par exemple, remarquabl­e que le gouverneme­nt de Bogota, pourtant marqué à droite, se soit engagé à mettre fin au plus ancien conflit du continent. Le fragile processus de paix colombien devra encore subir l’épreuve des urnes au printemps prochain et conjurer un retour de l’ancien régime.

Pour le reste, cette droite latino-américaine ne propose rien de neuf. Elle se contente de défaire ce qu’avaient entrepris ses prédécesse­urs. Le milliardai­re chilien Sebastian Piñera, qui a déjà été président de 2010 à 2014, a promis de revenir sur les réformes de la sortante Michelle Bachelet, notamment sur la dépénalisa­tion de l’avortement ou les droits des homosexuel­s. Au Brésil comme en Argentine, le retour de la droite a des allures de restaurati­on des oligarchie­s, alors que l’Amérique latine est toujours le continent le plus inégalitai­re.

Si cette vieille droite ne se réinvente pas, elle sera à son tour balayée dans les urnes le moment venu. A moins qu’elle ne s’accroche au pouvoir, comme les Castro et les disciples de Chavez qu’elle se plaît tant à vilipender.

Cette droite ne propose rien de neuf

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