En tous lieux, il y a une religion
Nous voyageons beaucoup et partout où nous allons, partout sans exception, il y a des églises, des temples, des minarets ou des stupas que nous visitons avec curiosité. Partout, sauf dans l’Europe chrétienne, ces lieux sont emplis de fidèles qui obéissent à des rites. En Inde et dans toute l’Asie, la religion dicte la vie quotidienne. Au Moyen-Orient, en Afrique, au Pakistan et aux Philippines, ce sont des millions de fidèles musulmans qui emplissent les mosquées. Le christianisme, première religion du monde (une moitié de catholiques, 38% de protestants et 12% d’orthodoxes), est très présent aux EtatsUnis (80%), au Congo (96%), au Mexique (95%) et plus généralement en Amérique du Sud, en Russie (74%) et aussi dans le sud de l’Afrique. En Suisse, selon l’Office fédéral de la statistique, il concerne encore 66% de la population.
Toutefois, en Europe surtout, ces chiffres ne reflètent pas la réalité dès lors que les musulmans sont, dans leur immense majorité, de fervents pratiquants, s’acquittant scrupuleusement de leurs cinq prières par jour, alors que la plupart des chrétiens dédaignent leurs lieux de culte sauf lors des fêtes carillonnées ou des enterrements, et encore. En Suisse, le taux de mariages religieux chez les couples catholiques est de 23% et de 30% chez les réformés. Sachant que les parents ayant négligé la case religieuse lors de leur union ne baptiseront pas leurs enfants, et qu’entre 1960 et 2015 le nombre des personnes se disant sans confession est passé de zéro à un quart, la tendance est programmée.
Dans ce contexte d’indifférence envers la religion qui a conditionné notre histoire, ce sont d’autres croyances qui suscitent l’intérêt. Le bouddhisme provoque curiosité et enthousiasme, même si l’affaire des Rohingyas vient ternir son image, sans empêcher le yoga et la méditation de faire fureur. Mais c’est l’attrait pour l’islam qui interpelle le plus. On voit en effet des Mains de Fatima pendre au cou de nos jeunes filles au lieu de la croix traditionnelle. Le ramadan est «in» et je connais bien des gens qui disent le pratiquer par discipline personnelle, alors qu’il leur suffirait de faire carême, comme leurs ancêtres. Des politiciennes féministes estiment que le voile intégral est acceptable. D’ardents défenseurs des animaux trouvent que le hallal, c’est très bien. Des thuriféraires de la cause LGBT trouvent fréquentable l’Arabie saoudite dont le code religieux stipule que la sodomie est un crime grave, sévèrement puni…
Sous prétexte de couper court à une islamophobie fantasmée, trop de gens refusent de considérer les pratiques contestables que véhicule cette religion. Certains lisent le Coran sous l’angle des sourates de La Mecque en omettant celles de Médine qui, pourtant, l’emportent chronologiquement. Ils en déduisent qu’il s’agit d’une religion de paix, même si Salman Rushdie subit sa fatwa depuis trente ans, même si les terroristes crient Allahu akbar avant de tuer des innocents, même si le 11-Septembre est considéré dans trop de familles musulmanes comme un jour de gloire, même si la femme n’y est pas l’égale de l’homme, même si l’apostasie est interdite. En raison de cette singulière fascination et aussi de l’extrême piété des musulmans, opposée à la tiédeur des chrétiens, la dynamique est en faveur de l’islam qui ne cesse de se développer. Les études le donnent majoritaire sur Terre peu après 2050. On prétend que c’est en raison d’une structure de population plus jeune, ce qui n’est pas faux, mais c’est oublier trop vite le nombre des conversions enregistrées en Europe et ailleurs.
C’est pourquoi, à tous les tenants de la laïcité, à tous les activistes de l’athéisme, à tous ceux qui honnissent le christianisme, il faut rappeler, paraphrasant un vieil adage concernant l’armée, que dans un pays, il y a toujours une religion, si ce n’est pas la sienne, c’est celle d’un autre. Mauvais présage en ce temps de Noël, soit, mais encouragement à témoigner sa foi et à la transmettre. Joyeux Noël à tous.