L’année de tous les dangers pour Angela Merkel
La chancelière, qui n’a toujours pas de partenaire de coalition, promet aux Allemands pour 2018 «un gouvernement stable rapidement». Mais la nouvelle année s’annonce périlleuse pour la chancelière, dont la cote de popularité est au plus bas
Angela Merkel n’a pris que de courtes vacances autour des fêtes de Noël. Fin décembre déjà, elle était de retour à Berlin, pour préparer la rédaction de ses traditionnels voeux télévisés. L’exercice était particulièrement délicat pour cette treizième édition, alors que l’Allemagne n’a toujours pas de gouvernement. Depuis les élections de septembre, la République fédérale est plongée dans la pire crise politique qu’ait traversée le pays depuis 1949. Il règne à Berlin, selon la presse allemande, une ambiance de fin de règne.
«Le plus gros problème du «merkelisme» est désormais Angela Merkel, écrivait en décembre le magazine Der Spiegel, en invitant cette dernière à rendre son tablier. Quand il est question d’Angela Merkel, il est presque tout le temps question de fin, presque jamais de début, ni d’élan.» Le quotidien conservateur Die Welt la qualifiait pour sa part de «femme d’hier». Les sondages ne sont guère plus positifs: selon la dernière enquête d’opinion YouGov, 47% des Allemands souhaitent qu’Angela Merkel mette fin à ses fonctions avant la fin de son quatrième mandat. Seuls 36% des Allemands souhaitent la voir au pouvoir pour quatre ans encore.
Contestée par la classe politique
Mêmes ondes négatives du côté de la classe politique. La jeune garde du Parti chrétien-démocrate (CDU) rue dans les brancards autour de Jens Spahn – un nom à retenir –, qui semble promis à un brillant avenir au sein du parti et à qui l’on prête l’ambition de viser la Chancellerie. L’aile bavaroise de la CDU, la CSU, prépare un virage à droite à Munich, avec la probable arrivée du très conservateur Markus Söder à la tête du Land à l’issue des élections régionales de 2018. Markus Söder et Jens Spahn se sont surtout fait un nom en critiquant la politique d’accueil des migrants décrétée par Angela Merkel à la fin de l’été 2015.
Quant à l’opposition, dominée par les populistes de l’AfD, elle ne fera aucun cadeau au futur gouvernement, comme l’a montré l’affaire du tweet de Beatrix von Storch ce week-end. La députée d’extrême droite s’en était violemment prise aux forces de l’ordre dans un message anti-réfugiés posté sur les réseaux sociaux. En vertu d’une loi en vigueur depuis le 1er janvier, Twitter et Facebook ont dû effacer le message dans les vingt-quatre heures, sous peine de lourde amende…
Dans ce contexte, il est difficile à Angela Merkel de faire passer le message d’optimisme qu’elle a concocté pour ses voeux, en promettant aux Allemands «un gouvernement stable rapidement». La stabilité du prochain gouvernement dépend en fait de l’issue des discussions qu’elle s’apprête à entamer le 7 janvier avec les sociaux-démocrates de Martin Schulz, très réticents à prolonger l’alliance sortante.
Pressions du SPD et des syndicats
Le SPD sera tenté de négocier au prix fort sa participation au pouvoir, exigeant des concessions de la CDU-CSU sur la question du regroupement familial pour les réfugiés arrivés récemment dans le pays, sur des baisses d’impôt pour les classes moyennes et sur les questions sociales, notamment sur la flexibilité du temps de travail. La ministre du Travail sortante, Andrea Nahles (SPD), n’était pas parvenue à imposer la possibilité pour tous les salariés à temps partiel d’exiger de leur employeur un temps plein s’ils le souhaitaient. Le sujet va de nouveau s’imposer dans les négociations en vue de former le prochain gouvernement. D’autant que le puissant syndicat de la métallurgie IG Metall a décidé de faire de la flexibilité du temps de travail au service des salariés sa principale revendication dans les négociations tarifaires qui viennent de débuter dans la branche.
Pression supplémentaire pour Angela Merkel, IG Metall a annoncé vouloir recourir à des grèves tournantes à partir du 8 janvier pour obtenir la semaine de 28h payée 35, pour une durée de deux ans, pour les salariés souhaitant réduire leur temps de travail pour des raisons personnelles (garde d’enfants, soins à des personnes âgées, formation continue, surmenage…). Avec la garantie de retrouver un temps plein au bout de ces deux années.
C’est donc un début d’année très difficile qui attend Angela Merkel. L’Allemagne n’aura sans doute pas de gouvernement avant le 1er avril.
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