«No Billag»: mettre le feu et assumer
«J’aime écouter tous les avis avant de me faire le mien. Mais pourquoi êtes-vous toujours aussi alarmistes? A force, on n’y croit plus…» Voilà comment m’interpellait un citoyen sur mon premier stand du mois de janvier. Ce reproche, je l’entends souvent. Il est compréhensible, tant il est vrai que de nombreuses campagnes se mènent sur un mode excessif. Sans jeter la pierre à quiconque, je suis consciente d’avoir moi aussi pu forcer le trait au moment d’évoquer les conséquences d’une décision. Car oui, en présence de projets complexes et techniques, la tactique s’impose parfois.
Il arrive cependant que le problème s’inverse. Qu’il y ait urgence à dépeindre avec précision des choses graves. Qu’on soit face à une proposition absolument limpide et que ce soient ses promoteurs eux-mêmes qui cherchent à en brouiller l’interprétation ou à en minimiser la portée. C’est ce à quoi nous assistons avec l’initiative «No Billag», et son impact tant sur les télévisions régionales que sur la RTS. A entendre certains initiants, il serait difficile à déterminer, chacune des chaînes concernées pouvant continuer à fonctionner sur un modèle différent. Or, pour ne prendre que le cas de la RTS, les choses sont très simples: l’initiative supprime trois quarts de ses recettes, issues de la redevance. Et le quart restant n’est pas à l’abri, puisque sans la grille actuelle des programmes, une partie substantielle des recettes publicitaires serait également perdue.
L’acceptation de «No Billag» signifierait non seulement la fin de la RTS et des chaînes régionales telles que nous les connaissons, mais aussi la fin d’un des piliers de notre démocratie directe. Car l’exercice de la démocratie directe est exigeant. Il suppose – du moins en théorie – des efforts de la part des votants. S’informer, saisir les enjeux, se forger un avis. La RTS, les chaînes et radios régionales que j’évoque y contribuent au quotidien par la diversité des opinions qu’elles véhiculent.
«No Billag» a des conséquences graves, quoi qu’en disent les initiants. Alors oui, cher Monsieur que j’ai croisé au marché, je veux bien, au titre des bonnes résolutions pour l’année qui débute, m’engager à ne pas faire croire que la maison brûle par facilité rhétorique ou tactique. Mais méfiez-vous, alors, tout autant, des pyromanes qui n’assument pas l’incendie.
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