Le Temps

Le Brexit annulé? Bruxelles en rêve encore

- RICHARD WERLY, PARIS @LTwerly

Et si le Royaume-Uni décidait de rester dans l’Union européenne? Certains ne veulent toujours pas l’exclure

Le premier à avoir allumé la mèche est… Nigel Farage. Interrogé le 11 janvier à la télévision, l'ex-député européen du UKIP, le parti anti-UE à l'origine du vote sur le Brexit, réclame en direct un second référendum. Pourquoi? «Pour sceller l'affaire une fois pour toutes, pour clouer le bec aux remoaners [contractio­n de remainers, «ceux qui veulent rester», et de moaners, «râleurs» en français] qui ne cesseront jamais de se plaindre.»

L'incendiair­e antieuropé­en ne renie donc rien. Au contraire. Mais le fait d'ouvrir la porte à un second vote n'a pas laissé indifféren­t, à Londres comme à Bruxelles: «Depuis le début, on veut considérer qu'il n'y aura pas de deuxième vote, juge un ancien diplomate anglais. Mais souvenez-vous de ce qui s'est passé en Irlande, en 2009, pour l'adoption du Traité de Lisbonne. Les Irlandais, qui l'avaient rejeté un an plus tôt, sont finalement retournés aux urnes et ont changé d'avis.»

Le doute, argument diplomatiq­ue

La question reste de pure fiction. L'ouverture imminente de la seconde phase de négociatio­ns a été approuvée par les 27 en décembre. Mais faire planer le doute est devenu aussi un argument diplomatiq­ue. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, l'a brandi en session plénière au Parlement à la mi-janvier. Provocatio­n? Voire. «Il ne faut pas ignorer le poids de l'opinion proeuropée­nne, qui demeure forte au RoyaumeUni», expliquait en décembre le négociateu­r européen Michel Barnier. «On peut refermer demain le dossier du divorce. Cela aura été coûteux, dur, mais on aura beaucoup appris», complète un de ses collaborat­eurs.

A Bruxelles, l'idée est surtout mise en avant pour bien montrer que l'UE n'est pas à l'origine de la séparation, et qu'elle n'entend pas «punir» le Royaume-Uni, alors que vont s'engager les difficiles négociatio­ns sur l'accès au marché unique. Donald Tusk, le président polonais du Conseil, en sait quelque chose. Dans son pays, l'opinion europhobe est chauffée à blanc par le parti Droit et justice au pouvoir. Que penser lorsqu'il dit que «les coeurs restent ouverts pour le Royaume-Uni»?

Réponse de l'élu centriste Jean-Marie Cavada sur France Info: «Plus l'UE demeure ferme sur les principes et les conditions du divorce, plus elle doit se montrer politiquem­ent ouverte. Les brexiters continuent de parler de l'UE comme d'une nouvelle Union soviétique. Nous devons démontrer qu'ils ont menti.»

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