La BCE riposte à Washington mais échoue à rassurer
Le président de la Banque centrale européenne Mario Draghi a indirectement dénoncé jeudi les déclarations du secrétaire américain au Trésor. Ce dernier soutient un dollar faible, faisant craindre le déclenchement d’une guerre monétaire mondiale
Le président de la Banque centrale européenne Mario Draghi a fustigé jeudi les déclarations de l'administration américaine en faveur du dollar faible, sans empêcher l'euro de s'envoler ni les bourses européennes de plonger.
Dans une allusion transparente au secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin, auteur mercredi d'un plaidoyer pour le dollar faible, Mario Draghi a fustigé «la communication» de cette «autre personne» qui «ne se conforme pas aux termes convenus» depuis «des décennies» en matière de changes.
Lors du Forum économique de Davos, Steven Mnuchin a affirmé qu'un «dollar plus faible» était «bon» pour les Etats-Unis puisqu'il favorise «le commerce et les opportunités», rompant avec des décennies de discours américain en sens inverse et faisant plonger le billet vert.
En réponse, Mario Draghi a rappelé les engagements multilatéraux à ne pas manipuler les changes, en citant les termes d'un accord d'octobre au sein du FMI.
Cela n'a pas suffi: non seulement ses propos n'ont pas endigué l'envolée de la monnaie unique, passée jeudi vers 14h00 GMT à 1,2537 dollar, son niveau le plus élevé depuis mi-décembre 2014, mais les places boursières ont plongé dans le rouge au même moment.
Taux directeur maintenu
L'institution de Francfort a maintenu son principal taux de refinancement à zéro et confirmé la poursuite de son vaste programme de rachats de dette publique et privée (QE) au rythme de 30 milliards d'euros par mois et ce, jusqu'à septembre 2018, voire «au-delà si nécessaire».
Surtout, Mario Draghi a maintenu le flou sur le calendrier des prochains tours de vis monétaires, soit la sortie du QE suivie «bien après» d'un premier relèvement des taux, renvoyant implicitement cette question à la prochaine réunion du 8 mars.
Objectif d’inflation trop éloigné
Il a une nouvelle fois brossé un tableau complexe en zone euro, fait de croissance soutenue mais d'inflation encore trop éloignée de l'objectif de la BCE, soit un peu moins de 2% sur le moyen terme.
«Pouvons-nous proclamer la victoire? La réponse est non, pas encore», a-t-il martelé.
Il a par ailleurs annoncé que la BCE allait «surveiller» la «volatilité récente du taux de change», qui constitue à ses yeux «une source d'incertitudes» susceptible de freiner l'évolution déjà trop faible des prix.
▅