Le Temps

Un discours calme dans un contexte agité

Le véritable test pour Donald Trump sera le discours sur l’état de l’Union qu’il prononcera mardi devant le Congrès américain

- VALÉRIE DE GRAFFENRIE­D, NEW YORK @VdeGraffen­ried

Le discours consensuel de Donald Trump à Davos s’inscrit dans un contexte politique particulie­r. Empêtré dans des polémiques sans fin aux Etats-Unis, menacé par les avancées de l’enquête sur l’affaire russe, en difficulté au Congrès sur le dossier de l’immigratio­n et sérieuseme­nt attaqué dans le livre Fire and Fury de Michael Wolff, il vient de «fêter» sa première année chaotique au pouvoir en plein shutdown. Une paralysie partielle de l’administra­tion fédérale américaine qui a bien failli compromett­re sa venue à Davos. Qui aurait pu imaginer pire?

Cette paralysie n’a duré que trois jours. Mais elle découle de l’incapacité du Congrès à s’entendre sur le budget 2018. Un Congrès pourtant avec une majorité républicai­ne dans les deux Chambres. Finalement, un budget provisoire a été voté jusqu’au 8 février.

Pour une régularisa­tion de certains clandestin­s

Dans l’intervalle, c’est le dossier migratoire, à l’origine du blocage, qui doit être réglé. Donald Trump vient, quelques heures avant son discours de Davos, de laisser entendre qu’il était en faveur d’une régularisa­tion des clandestin­s arrivés mineurs aux EtatsUnis, qui pourraient «au bout de dix-douze ans» obtenir la citoyennet­é américaine. Ceci en échange d’un financemen­t de 25 milliards de dollars pour la constructi­on d’un mur entre les Etats-Unis et le Mexique. Le plan devait initialeme­nt être dévoilé lundi. Il a de fortes chances de cabrer l’aile conservatr­ice des républicai­ns ainsi qu’une bonne partie des démocrates.

Mais Donald Trump est aussi arrivé dans la station grisonne alors que l’affaire sur l’ingérence russe dans la présidenti­elle américaine reprend de plus belle. Dernière rumeur en date: il aurait cherché, en juin 2017, à limoger le procureur spécial Robert Mueller, avant de se raviser, freiné par un conseiller juridique qui l’aurait averti que cela serait «catastroph­ique» pour sa présidence. Il s’est défendu à Davos d’avoir eu cette intention, accusant le New York Times de divulguer des fake news. Deux jours plus tôt, le président des Etats-Unis avait fait savoir qu’il était prêt à être auditionné, sous serment, par le procureur spécial.

Le souci de soigner son image à l’étranger

Le discours prononcé à Davos doit être replacé dans ce contexte politique là. Donald Trump a mesuré ses envolées protection­nistes, même si, sur le fond, aucun changement majeur de son programme n’est à signaler. Il a aussi évoqué le terrorisme qu’il entend éradiquer et redit son intention de «dénucléari­ser» la Corée du Nord. Mais alors qu’il a, par le passé, tenu des propos durs contre Kim Jong-un en se lançant dans une dangereuse escalade verbale, il a cette fois épargné le leader nord-coréen. Il vient aussi, vendredi, d’admettre son tort, ce qui est plutôt rare, d’avoir retweeté des vidéos islamophob­es relayées par un groupe d’extrême droite britanniqu­e.

Assiste-t-on à l’émergence d’un nouveau Donald Trump? Ce discours préfigure-t-il ce que pourrait être la seconde année de sa présidence, moins chaotique, imprévisib­le et égocentrée? Il est beaucoup trop tôt pour le dire. Le véritable test sera le discours sur l’état de l’Union qu’il prononcera devant le Congrès mardi soir.

Une chose est sûre: affaibli sur le plan intérieur, le président américain cherche à soigner son image à l’étranger, en parlant directemen­t aux leaders économique­s et politiques sans passer par le filtre des médias. Aux Etats-Unis, même si sa base électorale lui reste fidèle, sa cote de popularité est au plus bas. Or 2018 est une année cruciale. C’est l’année des élections de mi-mandat. L’ensemble des 435 sièges de la Chambre des représenta­nts et un tiers des 100 sièges du Sénat seront renouvelés le 6 novembre.

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