Le Temps

«Je n’ai pas le droit de sortir de disques!»

-

En 2012, Stephan Eicher sortait L’Envolée, son douzième album studio. Depuis, plus rien. Dès qu’on lui fait la remarque, il lâche l’air de rien cette explicatio­n: «Je n’ai pas le droit de sortir de disques!» Et de raconter qu’il a proposé deux live à Universal Music, un de la tournée L’Envolée, l’autre du projet Die Automaten, et que tous deux ont été refusés. «Je suis toujours sous contrat avec Universal, qui a été revendu à Vincent Bolloré [PDG du groupe Vivendi, propriétai­re notamment de Canal +, ndlr], un personnage spécial qui veut de son côté la céder à Wall Street. L’industrie du disque, les labels, de même que la Sacem et la Suisa, les sociétés des auteurs et compositeu­rs française et suisse, ne traitent pas bien les musiciens. Et il ne s’agit pas que de moi. Personnell­ement, je ne suis pas étonné de cette interdicti­on.»

Stephan Eicher est par contre libre de développer ses «envies musicales», comme il les appelle, sur scène. D’où les deux tournées simultanée­s qui font suite à l’aventure Die Automaten. «Ces pour cela que je conçois du coup mes concerts comme des pièces de théâtre, avec sur ce nouveau projet avec Traktorkes­tar plusieurs nouveaux morceaux. Ça, j’en ai le droit. Mais il faut vraiment que les musiciens relisent leur contrat, car il y a des points qui ne vont plus à cause du streaming. On a vendu nos droits contre un pourcentag­e, mais maintenant les maisons de disques louent ces droits à des sociétés de streaming; il y a là une zone très grise. Quand tout sera fini pour moi, j’écrirai peut-être un livre, en donnant aussi le point de vue de l’industrie. Je ne dis pas forcément que je suis le gentil et qu’ils sont les méchants, même s’ils sont quand même un peu plus méchants… En tous les cas, si vous avez un problème de contrat, demandez-moi!»

Le Bernois prend encore l’exemple de YouTube. «Comme je suis un bon client et que je leur amène de l’argent, la Suisa m’a écrit pour me dire qu’ils étaient heureux de m’annoncer avoir trouvé un arrangemen­t avec YouTube, et que maintenant la plateforme allait devoir payer des droits. Je leur ai alors demandé quelle était la nature de cet accord, et ils m’ont répondu que les termes mêmes de l’accord leur interdisai­ent de le révéler. C’est facile de voir qui est le plus fort. La Suisa n’est plus au service des artistes, et ils devraient se demander pour qui ils travaillen­t.»

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland