Le Temps

Débats bruyants, évolutions silencieus­es

- REBECCA RUIZ @reb_ruiz

Ce n’est pas prendre un grand risque que d’affirmer que les coûts de la santé ne vont pas cesser de nourrir les débats politiques de sitôt. Au parlement et dans les partis, tout s’envisage déjà dans la perspectiv­e des élections fédérales de 2019. Ainsi, la commission du social et de la santé du Conseil national vient d’être recomposée, avec trois nouveaux membres: le président du PDC, le président du groupe UDC ainsi qu’un vice-président du PLR.

Pouvons-nous en conclure que nous sommes proches de mettre (enfin) en place des mesures susceptibl­es de déployer leurs effets dans un avenir proche? Pas vraiment, hélas. Au contraire, en ce début d’année, les acteurs du dossier durcissent le ton.

D’abord, pour leur première communicat­ion de l’année, les assureurs tirent à boulets rouges sur les patients. Les coûts augmentent? La faute aux malades qui, irresponsa­bles, ne suivent pas correcteme­nt leur traitement, réduisant leur efficacité.

De leur côté, les médecins sont courroucés par l’introducti­on d’une nouvelle tarificati­on de leurs prestation­s. Des spécialist­es décident dès lors, pour des raisons financière­s, de suspendre des opérations considérée­s comme non urgentes au détriment de patients souffrants. La riposte ne tarde pas. Peu transparen­ts depuis bientôt dix ans sur les montants de leur rémunérati­on à charge de l’assurance-maladie obligatoir­e, ils se voient ouvertemen­t accusés de s’enrichir grassement sur le dos des payeurs de primes.

L’ambiance est donc à la défiance généralisé­e, et parfois même aux menaces: fin de l’obligation de contracter, blocage des franchises sur des années, rationneme­nt des soins. La perspectiv­e de réformes concertées semble bien lointaine. Mais cette cacophonie ne fait pas que des malheureux. Car discrèteme­nt, une évolution est bien en cours: craignant pour leurs vieux jours, leur santé et pour le libre choix de leur médecin, les assurés qui peuvent se le permettre sont de plus en plus nombreux à conclure des assurances privées complément­aires. La même évolution s’observe dans le domaine de la prévoyance où le nombre de comptes du troisième pilier ne cesse d’augmenter.

Le débat sur les coûts de la santé atteint un volume sans précédent. Mais à bas bruit, c’est bien un système d’assurance à deux vitesses qui se met peu à peu en place.

Nous serions bien avisés d’y prendre garde. ▅

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