En Italie, à l’extrême droite toute sur l’immigration!
Silvio Berlusconi a promis le renvoi de centaines de milliers de migrants en cas de victoire aux élections législatives du 4 mars. Depuis une fusillade raciste samedi, le discours politique se durcit toujours plus
Qui aura le discours le plus radical sur l’immigration? En Italie, Silvio Berlusconi et Matteo Salvini prônent une ligne toujours plus dure sur la question. Le premier, président de Forza Italia et ancien chef du gouvernement, promet d’expulser 630000 migrants. Le second, secrétaire fédéral de la Ligue, parti xénophobe et eurosceptique, l’a répété déjà plusieurs fois et se réjouit de se voir donner raison par le Cavaliere.
Les formations des deux hommes sont les principaux piliers de la coalition de centre droit, donnée gagnante aux élections législatives du 4 mars prochain. Forza Italia est crédité de 17% d’intentions de vote, contre 11,5% pour la Lega, selon un dernier sondage publié dimanche. La surenchère de promesses des deux partis a été provoquée par une fusillade, samedi dans le centre de la Botte.
Un Italien de 28 ans a ouvert le feu sur des badauds à Macerata. Six personnes, toutes originaires de pays africains, ont été blessées. Le tireur a choisi ses victimes pour leur couleur de peau. Il a été inculpé pour «massacre aggravé à caractère raciste». Le jeune homme ayant été candidat de la Ligue lors d’élections communales l’an dernier, Matteo Salvini s’est empressé de réagir samedi, condamnant l’acte, mais accusant aussitôt une «immigration hors de contrôle», conséquence de la politique de la gauche au pouvoir depuis 2013.
D’abord discret, Silvio Berlusconi lui a emboîté le pas le lendemain. Les clandestins ne peuvent pas rester, car ils sont «prêts à commettre des crimes», a lancé l’ancien premier ministre à la télévision. Seuls 5% des migrants en Italie ont le droit de rester, a-t-il poursuivi, «car réfugiés. Les autres représentent une bombe sociale prête à exploser.»
Débat politique violent
Ni Silvio Berlusconi ni Matteo Salvini n’expliquent le chiffre qu’ils avancent. Il s’agirait en réalité de l’addition des arrivées de migrants par la Méditerranée depuis 2014. Autrement dit depuis la prise du pouvoir par Matteo Renzi. L’ancien chef de gouvernement et secrétaire du Parti démocrate avait appelé samedi après la fusillade au «calme et à la responsabilité» et avait été entendu par le Mouvement 5 étoiles (M5S), aujourd’hui première formation politique du pays. Mais lundi, le démocrate et le leader du M5S, Luigi Di Maio, n’ont plus retenu les coups.
Les deux hommes ont imputé au magnat de la presse octogénaire la responsabilité de la vague migratoire. D’abord en ayant signé le Règlement Dublin II, texte obligeant le pays d’arrivée d’un migrant d’examiner sa demande d’asile. Puis en ayant participé à la guerre en Libye en 2011, dont l’instabilité a permis ensuite le départ de milliers de migrants. Cette année, au 5 février, 4723 personnes ont débarqué sur les côtes italiennes, soit 43,95% de moins que durant la même période en 2017; 119369 migrants sont arrivés dans la Péninsule l’an dernier, contre 181436 l’année précédente.
Si la droite et l’extrême droite ont encore durci leur discours sur l’immigration ces jours, la gauche au pouvoir applique une politique plus ferme depuis l’arrivée au Ministère de l’intérieur de Marco Minniti, il y a plus d’un an. Sa ligne pour réduire le flux migratoire prévoit notamment une aide aux pays de départ et de transit, une augmentation des renvois de clandestins et une politique plus sévère envers les ONG venant en aide aux migrants en mer.
Le débat politique, à un mois exactement des élections législatives, est devenu si violent qu’il a obligé le président de la République à prendre la parole. «Le manque de sens de communauté mène à la méfiance, à l’intolérance et parfois à la violence», a affirmé Sergio Mattarella, deux jours après la fusillade. Mais dans le brouhaha politique, son message est passé inaperçu.
A droite, la course au discours le plus radical se poursuivra donc encore un mois sur l’un des thèmes les plus sensibles dans la Péninsule. Car le parti de la coalition recueillant le plus de voix, si celle-ci remporte les élections, pourra désigner la personnalité chargée de former un gouvernement. Silvio Berlusconi, trois fois premier ministre, ne compte pas laisser cet honneur à Matteo Salvini. ▅