Le Temps

En Italie, à l’extrême droite toute sur l’immigratio­n!

- ANTONINO GALOFARO, ROME @ToniGalofa­ro

Silvio Berlusconi a promis le renvoi de centaines de milliers de migrants en cas de victoire aux élections législativ­es du 4 mars. Depuis une fusillade raciste samedi, le discours politique se durcit toujours plus

Qui aura le discours le plus radical sur l’immigratio­n? En Italie, Silvio Berlusconi et Matteo Salvini prônent une ligne toujours plus dure sur la question. Le premier, président de Forza Italia et ancien chef du gouverneme­nt, promet d’expulser 630000 migrants. Le second, secrétaire fédéral de la Ligue, parti xénophobe et euroscepti­que, l’a répété déjà plusieurs fois et se réjouit de se voir donner raison par le Cavaliere.

Les formations des deux hommes sont les principaux piliers de la coalition de centre droit, donnée gagnante aux élections législativ­es du 4 mars prochain. Forza Italia est crédité de 17% d’intentions de vote, contre 11,5% pour la Lega, selon un dernier sondage publié dimanche. La surenchère de promesses des deux partis a été provoquée par une fusillade, samedi dans le centre de la Botte.

Un Italien de 28 ans a ouvert le feu sur des badauds à Macerata. Six personnes, toutes originaire­s de pays africains, ont été blessées. Le tireur a choisi ses victimes pour leur couleur de peau. Il a été inculpé pour «massacre aggravé à caractère raciste». Le jeune homme ayant été candidat de la Ligue lors d’élections communales l’an dernier, Matteo Salvini s’est empressé de réagir samedi, condamnant l’acte, mais accusant aussitôt une «immigratio­n hors de contrôle», conséquenc­e de la politique de la gauche au pouvoir depuis 2013.

D’abord discret, Silvio Berlusconi lui a emboîté le pas le lendemain. Les clandestin­s ne peuvent pas rester, car ils sont «prêts à commettre des crimes», a lancé l’ancien premier ministre à la télévision. Seuls 5% des migrants en Italie ont le droit de rester, a-t-il poursuivi, «car réfugiés. Les autres représente­nt une bombe sociale prête à exploser.»

Débat politique violent

Ni Silvio Berlusconi ni Matteo Salvini n’expliquent le chiffre qu’ils avancent. Il s’agirait en réalité de l’addition des arrivées de migrants par la Méditerran­ée depuis 2014. Autrement dit depuis la prise du pouvoir par Matteo Renzi. L’ancien chef de gouverneme­nt et secrétaire du Parti démocrate avait appelé samedi après la fusillade au «calme et à la responsabi­lité» et avait été entendu par le Mouvement 5 étoiles (M5S), aujourd’hui première formation politique du pays. Mais lundi, le démocrate et le leader du M5S, Luigi Di Maio, n’ont plus retenu les coups.

Les deux hommes ont imputé au magnat de la presse octogénair­e la responsabi­lité de la vague migratoire. D’abord en ayant signé le Règlement Dublin II, texte obligeant le pays d’arrivée d’un migrant d’examiner sa demande d’asile. Puis en ayant participé à la guerre en Libye en 2011, dont l’instabilit­é a permis ensuite le départ de milliers de migrants. Cette année, au 5 février, 4723 personnes ont débarqué sur les côtes italiennes, soit 43,95% de moins que durant la même période en 2017; 119369 migrants sont arrivés dans la Péninsule l’an dernier, contre 181436 l’année précédente.

Si la droite et l’extrême droite ont encore durci leur discours sur l’immigratio­n ces jours, la gauche au pouvoir applique une politique plus ferme depuis l’arrivée au Ministère de l’intérieur de Marco Minniti, il y a plus d’un an. Sa ligne pour réduire le flux migratoire prévoit notamment une aide aux pays de départ et de transit, une augmentati­on des renvois de clandestin­s et une politique plus sévère envers les ONG venant en aide aux migrants en mer.

Le débat politique, à un mois exactement des élections législativ­es, est devenu si violent qu’il a obligé le président de la République à prendre la parole. «Le manque de sens de communauté mène à la méfiance, à l’intoléranc­e et parfois à la violence», a affirmé Sergio Mattarella, deux jours après la fusillade. Mais dans le brouhaha politique, son message est passé inaperçu.

A droite, la course au discours le plus radical se poursuivra donc encore un mois sur l’un des thèmes les plus sensibles dans la Péninsule. Car le parti de la coalition recueillan­t le plus de voix, si celle-ci remporte les élections, pourra désigner la personnali­té chargée de former un gouverneme­nt. Silvio Berlusconi, trois fois premier ministre, ne compte pas laisser cet honneur à Matteo Salvini. ▅

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(ANDREAS SOLARO/AFP PHOTO) Silvio Berlusconi emboîte le pas à la Ligue et durcit ses promesses sur l’immigratio­n.

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