Le Temps

Une correction bienvenue. Avant le chaos?

- SYLVAIN BESSON @SylvainBes­son

Toute ressemblan­ce avec des événements survenus il y a dix ans serait purement fortuite. En 2008, la phase aiguë de la crise financière s’était ouverte par une chute vertigineu­se des bourses qui, sur fond de crise bancaire, avait paralysé l’économie mondiale.

Rien de tel aujourd’hui, au contraire. La plongée des marchés depuis vendredi marque la fin d’une décennie d’anomalies issues de la Grande Dépression. La question est désormais de savoir où se trouvent les prochains risques systémique­s globaux.

Avec la fin des taux d’intérêt nuls et des injections de liquidités par les banques centrales, on revient dans un monde où emprunter de l’argent coûte quelque chose, où les prix et les salaires augmentent, où l’argent facile ne dope plus en permanence les marchés. Le fait que Wall Street ait vécu lundi sa «pire journée depuis 2011» montre simplement que l’économie mondiale va mieux.

Autre différence avec la crise financière: cette fois, les régulateur­s assurent qu’ils ont la situation en main.

L’effondreme­nt ces derniers jours du bitcoin, passé en quelques semaines de 19000 à 6000 dollars l’unité, montre que leur discours n’est pas entièremen­t creux. Il a suffi que quelques pays menacent de sévir pour que la cryptomonn­aie rentre dans le rang. Un mouvement accentué hier par la BRI – clé de voûte du système des banques centrales – qui appelle à intervenir «si nécessaire» contre le bitcoin.

Avec le dégonfleme­nt des bulles financière­s et le retour de la croissance, 2018 commence sous des auspices idylliques. Mais cela pourrait ne pas durer. A Davos, les prescripte­urs de l’élite mondiale s’inquiétaie­nt des vulnérabil­ités liées aux nouvelles technologi­es – robots et algorithme­s sont d’ailleurs accusés d’avoir accentué la chute des bourses. Mais il y a peutêtre plus grave: le spectre d’un choc géopolitiq­ue.

Avant et pendant les Fêtes, les commentate­urs se sont demandé si l’année qui s’ouvre ne serait pas celle où la politique étrangère de Donald Trump ferait «boum». La nouvelle posture de défense américaine, dévoilée ces jours, fait état d’un net retour des menaces militaires venues d’Etats «révisionni­stes» ou «voyous» comme la Russie, la Chine, l’Iran ou la Corée du Nord.

Pour la première fois depuis la fin de la Guerre froide, l’hypothèse d’une guerre entre puissances ressurgit. Or, le développem­ent du capitalism­e depuis 1945 s’est toujours fait à l’ombre d’une hégémonie américaine indiscutée. Ce monde-là est en train de disparaîtr­e. Si ce regain de tension politiques­se confirme, les soubresaut­s boursiers des derniers jours feront figure de simple anecdote.

C’est du champ géopolitiq­ue que pourraient venir les prochains chocs

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