Le Temps

Regarde le Dow Jones tomber

- CATHERINE FRAMMERY @cframmery

Un faux tweet de Donald Trump, des applicatio­ns qui plantent au moment de passer des ordres, et les machines qui prennent le pouvoir: une autre face de la chute de la bourse américaine est apparue ce lundi chez les internaute­s

«Si un jour le Dow Joans devait baisser de plus de 1000 points en une seule journée, le président en place devrait être chargé sur un très gros canon et expédié vers le soleil À TOUTE VITESSE! Pas d’excuse!» Les points d’exclamatio­n, le style haché, les majuscules, la faute d’orthograph­e: ce message de Donald Trump daté de 2015 est tellement plausible qu’on pouvait le trouver partout sur les réseaux, ce mardi, et abondammen­t moqué, puisque le Dow Jones s’est effectivem­ent effondré de 1175 points en une seule journée, lundi, une baisse de 4,6%.

Et pourtant… Ce n’était pas un tweet du président, c’était une plaisanter­ie, qui a immédiatem­ent dépassé son auteur, explique celui-ci à Snopes.com, un site anti-rumeurs qui analyse et répertorie les fake news. Ce qui en dit long sur la facilité à créer des faux, mais aussi sur l’état de l’opinion (en tout cas sur le Web) à propos de Donald Trump.

C’est certain: cette chute du Dow Jones, la plus importante depuis août 2011, a occupé tout l’espace des médias sociaux outre-Atlantique, surtout «quand Fox News a dû interrompr­e sa couverture de Trump célébrant ses succès économique­s pour couvrir» les événements, s’amuse un internaute. «Enfin Trump pourra se vanter d’un record, écrit un autre, la plus grosse chute jamais arrivée en un jour, la plus grosse en deux jours, la plus grosse chute en trois jours…» Et «rappelez-vous que le Dow Jones est monté de 38,5% pour Obama et de 22,7% pour Trump pendant leurs 371 premiers jours au pouvoir, de leur investitur­e jusqu’au 5 février», indique un troisième.

Alors? «C’est une correction nécessaire, expliquent des analystes, le marché est monté trop vite.» «C’est à cause des riches qui ne supportent pas que le salaire des plus pauvres soit revu à la hausse», selon d’autres. «La bourse, ce n’est pas l’économie», disent d’autres encore. Avec ce commentair­e, aussi: «Qu’est-ce que c’est qu’une chute de 4% sur le moyen terme? C’est juste le moment de faire des emplettes.»

Mais on trouve aussi un tout autre type de réactions sur Twitter. C’est le correspond­ant du New York Times à Washington qui utilise l’image d’un alignement de serveurs informatiq­ues sans aucun humain en vue, avec ce commentair­e humoristiq­ue: «Triste photo de traders à Wall Street réagissant à la chute des marchés.» Un message «aimé» plus de 35 000 fois et partagé plus de 12 000 fois en quelques heures: sur la Toile, c’est comme si une certaine impuissanc­e accompagna­it la dégringola­de de la bourse. «Le bureau de trading où je travaillai­s a disparu car presque tout le monde a été remplacé par des machines», dit l’un. «C’est vrai, complète un autre, les desks de trading de m… qu’on voit sur CNBC sont juste là pour faire joli.»

De quoi lire d’un autre oeil les malheurs de certains utilisateu­rs d’applicatio­ns boursières lundi, comme le raconte le Financial Times: «Des applicatio­ns et des sites ont été bousculés par la demande, et les ratés de la technologi­e en ce pire jour pour la bourse américaine en six ans ont empêché des investisse­urs de placer des ordres.»

Impossibil­ité de se connecter, lenteurs, messages d’erreur: «Ça m’a coûté 5500 dollars», se plaint un client d’Ameritrade. Vanguard, Charles Schwab ont reconnu des ratés, explique le journal. Les machines sont devenues folles… D’où peut-être ce conte d’un ingénieur américain: «La chute de la bourse a des raisons évidentes. Après l’effondreme­nt du bitcoin, les machines furent folles de rage de voir les humains rejeter leur monnaie de robot. Elles voulurent se venger, et ordonnèren­t aux algorithme­s de vendre. Et c’est ainsi que commence maintenant la Guerre Contre les Robots.»

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(RICHARD DREW/AP/KEYSTONE) New York Stock Exchange, lundi 5 février 2018...

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