Le Temps

Rapprochem­ent olympique à Pyeongchan­g

- PHILIPPE MESMER, SÉOUL (LE MONDE)

CORÉE DU NORD La cadette du dirigeant nord-coréen devient le visage de la politique d’apaisement avec Séoul. Elle est la première de sa famille à se rendre au Sud pour les Jeux olympiques

Pour la première fois depuis la fin de la guerre de Corée, un membre de la famille des Kim, au pouvoir en Corée du Nord – connue comme la «lignée du mont Paektu» –, se rend en visite au Sud. Kim Yo-jong, petite soeur de l’actuel dirigeant, Kim Jong-un, dont elle aurait toute la confiance, est arrivée vendredi 9 février autour de 13h30, heure locale, à l’aéroport d’Incheon, non loin de Séoul, à bord d’un Iliouchine 62M, avion personnel de son frère.

Cible de l’insistante attention des médias sud-coréens, vêtue de noir, volontiers souriante, Kim Yo-jong a été accueillie par le ministre de l’Unificatio­n, Cho Myoung-gyon. Elle accompagne Kim Yong-nam, président du présidium de l’Assemblée populaire suprême nord-coréenne qui dirige la délégation envoyée par Pyongyang, et a rencontré le chef de l’Etat sud-coréen, Moon Jae-in, vendredi, avant d’assister à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Pyeongchan­g.

Déjeuner présidenti­el

Avec le reste de la délégation, elle déjeunera samedi 10 février avec le président, Moon Jae-in. La venue de Madame Kim «démontre la volonté du Nord de réduire la tension sur la péninsule», estimait, le 7 février, la présidence sud-coréenne en annonçant sa présence. La question est de savoir quel message elle porte au nom de son frère et si une entrevue avec le vice-président américain, Mike Pence, présent lui aussi à Pyeongchan­g pour la cérémonie d’ouverture, aura lieu. Ce dernier ne s’y est pas montré hostile.

Agée d’une trentaine d’années – elle serait née en 1987 selon les services sud-coréens, et en 1989 selon les Américains –, Madame Kim a connu une ascension rapide au sein de l’appareil nord-coréen. Nommée en octobre 2017 membre du bureau politique du Parti du travail, elle avait été auparavant promue au poste de directrice adjointe du départemen­t d’agitation et de propagande au sein du parti. Proche du dictateur, elle gère ses «visites sur le terrain pour donner des instructio­ns», notamment le programme, les besoins logistique­s et la sécurité. Elle entretient de ce fait des liens avec le puissant Ministère de la sécurité d’Etat.

A l’école Steinhölzl­i

Ce parcours découle de ses liens particulie­rs avec Kim Jong-un. Elle est la plus jeune des trois enfants du dirigeant Kim Jong-il (1941-2011) et de sa quatrième épouse, Ko Yong-hui (1952-2004). Ses aînés sont Kim Jong-chol (né en 1981, sans fonction connue) et l’actuel dirigeant, né en 1983. Elle a suivi comme ses frères une scolarité en Suisse entre 1996 et 2000 à l’école publique Steinhölzl­i de Liebefeld, qui accueille les enfants de personnels diplomatiq­ues, près de Berne. Sa mère venait de temps en temps rendre visite à ses enfants.

De retour à Pyongyang, elle a suivi des cours à l’université Kim Il-sung et, après la mort de sa mère, dans un établissem­ent

Agée d’une trentaine d’années, Madame Kim a connu une ascension rapide au sein de l’appareil nord-coréen

d’Europe occidental­e. Elle semblait déjà manifester un intérêt pour les affaires d’Etat. Dès 2002, explique le site spécialisé North Korea Leadership Watch, «Kim Jong-il affirmait fièrement à ses interlocut­eurs étrangers que sa plus jeune fille s’intéressai­t à la politique et voulait mener une carrière au sein de l’appareil de la RPDC».

Apparition­s multiples

En 2007, elle aurait intégré le parti et travaillé sous la direction de Kim Jong-il et de sa tante, Kim Kyong-hui, dont elle s’inspirerai­t pour ses activités actuelles. Après l’attaque cérébrale subie en 2008 par son père et l’accélérati­on des préparatif­s de la succession, Kim Yo-jong est promue dans l’entourage direct de Kim Jong-il. Elle participe dès lors à ses déplacemen­ts sur le terrain, même si elle apparaît peu sur les photos officielle­s.

Selon la presse sud-coréenne citant les renseignem­ents chinois, elle serait mariée au plus jeune fils de Choe Ryonghae, actuelleme­nt directeur du départemen­t chargé de l’organisati­on du pouvoir. Son époux travailler­ait au service des finances et de la comptabili­té du parti. Il aurait des liens avec la Division 39, créée dans les années 1970 pour gérer les avoirs de la famille Kim.

Sa première mention officielle par des médias nord-coréens remonte à mars 2014, à l’occasion d’un vote de l’Assemblée populaire suprême. Depuis, ses apparition­s se multiplien­t, en arrière-plan des photos officielle­s, souvent en tenue vert olive, celle des journalist­es documentan­t les déplacemen­ts du dirigeant. «Elle ne s’affiche jamais habillée avec des vêtements de luxe ou portant des accessoire­s voyants, note un expert de la Corée du Nord. Sans doute parce qu’elle est au service de l’image du dirigeant qui doit être seul dans la lumière.»

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SPORT La cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’hiver de 2018 a mis l’accent sur les appels à la paix entre les deux parties de la péninsule – la soeur de Kim Jong-un a d’ailleurs fait le déplacemen­t au Sud. L’attention se porte dès aujourd’hui...
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(KYODO/VIA REUTERS) Kim Yo-jong vendredi, à son arrivée à l’aéroport internatio­nal d’Incheon.

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