DU NOUVEAU CHEZ MEMO
Lorsqu'une maison, reconnue depuis vingt-cinq ans pour la qualité de ses albums, se lance dans la publication de romans, la curiosité des grands et des petits ne peut qu'être attisée
En janvier sont parus les premiers romans des Editions MeMo, une aventure dont les rênes ont été confiées à Chloé Mary. Son amour des textes, du travail avec les auteurs (dont elle a témoigné pendant dix-sept ans aux Ed. L’Ecole des loisirs) trouve à s’exprimer dans ces «espaces de liberté» que sont à ses yeux ces nouvelles collections. Ces dernières font la part belle à l’illustration et portent le beau nom de «Polynies»: on nomme ainsi des trous d’eau dans la banquise, des espaces que le vent ou des courants empêchent de se refermer; beau symbole.
La Petite Epopée des pions, c’est l’histoire de Sasha, Sasha et autres Sasha. Ils vivent dans un coffret en bois et obéissent au doigt et à l’oeil à La Main qui les place et les déplace sur un damier. Ils sont heureux, parce qu’ils ne connaissent pas autre chose. Sauf… Sasha. Lui, il a envie de découvertes, d’aventures. Lui, il est prêt à se risquer au-dehors. Audren propose là un récit teinté de philosophie; ne pense-t-on pas à l’allégorie de la caverne lorsque avec Sasha on s’interroge: et si notre monde n’était que le pâle reflet d’un autre, bien plus coloré et passionnant?
Un récit énergique, incitatif, qui secoue les états d’âme convenus, le confort unanime, pour chanter le beau risque d’être libre, l’irremplaçable bonheur de vivre ses rêves. Les illustrations en noir et blanc de Cédric Philippe, qui parfois «racontent» seules le temps de quelques doubles pages, déploient l’imaginaire à force de citations hallucinées, et accom- pagnent avec beaucoup de justesse et d’audace cette aventure aussi originale que valorisante.
ATTRAPER DE FOLLES IDÉES AU VOL
Dans un tout autre registre, Truffe et Machin d’Emile Cucherousset plonge le lecteur dans un univers où malice et tendresse se disputent la vedette. Deux frères lapins s’entendent à merveille pour faire toutes les bêtises qui leur passent par les moustaches, comme attraper de folles idées au vol et leurs ombres dans une boîte… Ici, chaque journée se savoure comme un plat expérimental autant que délicieux, les relations «humaines» se déclinent au gré de situations rocambolesques, les dialogues jouent à saute-mouton avec les pensées. Quant aux images de Camille Jourdy, elles se savourent comme des friandises colorées, et tout particulièrement ses décors, qui enchantent ce petit monde poétique et loufoque.