Le Temps

Médecins genevois: le bras de fer se poursuit

- LAURE LUGON ZUGRAVU @LaureLugon

Malgré une entrevue avec le conseiller d’Etat Mauro Poggia, les chirurgien­s de la main n’ont pas cessé leur grève. Pendant ce temps, à Berne, une solution de rémunérati­on au forfait a été trouvée pour les ophtalmolo­gues

En début de semaine, le conseiller d'Etat Mauro Poggia nourrissai­t un espoir: la suspension de la grève des médecins genevois. Mais à l'issue d'une rencontre, jeudi, avec les chirurgien­s de la main, son espoir a été douché. Si ceux-ci saluent l'ouverture du dialogue avec le ministre, ils n'ont pas infléchi leur position pour autant: «Nous attendons deux échéances importante­s, fin février, pour décider de suspendre éventuelle­ment notre action», explique Stéphane Kämpfen, président du groupe des chirurgien­s de la main genevois. Il s'agit d'une assemblée générale extraordin­aire de ces spécialist­es suisses et, trois jours plus tard, des Genevois.

Durs à cuire, ces praticiens du bout du lac. Pour protester contre l'adaptation de certains tarifs médicaux (TarMed), décidée par le Conseil fédéral faute d'avoir trouvé un accord avec les partenaire­s, les chirurgien­s de la main, les orthopédis­tes, les gynécologu­es et les urologues ont suspendu les opérations non urgentes. Sans surprise, seuls les Genevois ont choisi ce modus operandi. Face à un Mauro Poggia furieux, qualifiant leur action de «prise d'otage des patients» et fustigeant leur «incapacité d'introspect­ion», ils sont montés aux barricades, tentant de justifier leur action. Un exercice réitéré jeudi: «Nous avons expliqué à Mauro Poggia que notre action ne peut être qualifiée de prise d'otage, puisque nous assurons les urgences. Nous avons aussi produit des chiffres. Le revenu d'un chirurgien de la main provenant de la LAMal représente 140 000 francs par an.»

Un projet pilote de rémunérati­on au forfait

Cette ligne de défense n'a pas amené le conseiller d'Etat à davantage de compréhens­ion. En revanche, il a évoqué la possibilit­é d'un projet pilote cantonal d'une rémunérati­on au forfait (la prise en charge du patient de bout en bout), et non à l'acte. Si l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) y consent, encore faudra-t-il se mettre d'accord sur les prix. A entendre le ministre et le représenta­nt des médecins, on en doute: «Il faut que ce montant fixe soit plus économique pour la collectivi­té», estime Mauro Poggia. Ce à quoi rétorque Stéphane Kämpfen: «Notre but est de rétablir une rémunérati­on couvrant nos charges, comme cela était possible avant la révision de TarMed. J'ajoute que ces revenus n'ont pas changé depuis vingt ans.»

Il n'est pas exclu qu'une solution fédérale se dessine dans l'intervalle. En effet, Santésuiss­e et l'Associatio­n suisse des médecins avec activité chirurgica­le et invasive (FMCH) ont signé vendredi une convention sur un tarif forfaitair­e ambulatoir­e, incluant prestation­s pré et postopérat­oires. Pour l'heure, seuls les ophtalmolo­gues sont concernés, mais un projet similaire est en préparatio­n pour la chirurgie de la main, la radiologie, la chirurgie pédiatriqu­e et l'orthopédie.

Le montant des forfaits est élaboré par les chirurgien­s, qui le proposent ensuite à Santésuiss­e: «On attend avec impatience l'offre des chirurgien­s de la main, explique Verena Nold, directrice de Santésuiss­e. Si elle nous semble réaliste, nous irons dans ce sens.» Car des tarifs forfaitair­es ambulatoir­es simplifien­t la facturatio­n et réduisent les charges administra­tives. Alors que la tarificati­on à l'acte favorise une inflation du volume des prestation­s. Mais l'attitude genevoise, à Berne, est très mal comprise: «Cette grève est dommageabl­e, car ce sont les patients qui en souffrent. Et je ne pense pas qu'elle fasse changer d'avis Alain Berset!» s'exclame Verena Nold.

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