Le Temps

Affaire Maëlys: le suspect avoue

- NATHALIE VERSIEUX, BERLIN

Après six mois de déni, il est passé aux aveux. L’ancien militaire, principal suspect dans la disparitio­n de la petite Maëlys lors d’un mariage en Isère, a avoué l’avoir tuée «involontai­rement». Les restes du corps de la fillette de 9 ans ont été découverts dans une forêt du massif de la Chartreuse.

Le chef des Jeunes socialiste­s allemands, Kevin Kühnert, est en campagne contre la Grande Coalition qui doit unir CDU et SPD au pouvoir autour d’Angela Merkel. Il appelle la base de son parti à voter non à cette alliance

Mardi 19h30, aux abords d’un petit pavillon en préfabriqu­é de Berlin, à quelques encablures de l’imposant siège de verre et d’acier du SPD. Le minuscule bâtiment, perdu au bord d’un parc où la communauté turque sort ses barbecues l’été, abritait dans les années 1990 les bureaux de l’administra­tion chargée de l’accueil de la première vague de réfugiés, chassés par la guerre en Yougoslavi­e. Il héberge aujourd’hui une associatio­n culturelle turque. Une petite foule se presse vers le bâtiment, venue discuter avec Kevin Kühnert. Inconnu du grand public voici encore cinq mois, l’homme est devenu le symbole de la rébellion d’une partie du SPD contre la GroKo, la Grande Coalition qui doit de nouveau unir CDU et SPD au pouvoir autour d’Angela Merkel.

Kevin Kühnert, 28 ans, mène la fronde.

Une grande consultati­on

Début février, Kevin Kühnert a entamé un tour d’Allemagne qui le mène ce soir à la rencontre des militants du quartier alternatif de Kreuzberg. Son message: «Votez non» lors de la consultati­on par laquelle les 465000 membres du SPD sont invités à se prononcer par envoi postal pour ou contre une nouvelle Grande Coalition. Le résultat, qui sera connu le 4 mars, s’annonce serré.

A 28 ans, Kevin Kühnert est le chef des Jusos, les Jeunes socialiste­s allemands, une organisati­on interne au SPD, forte de 70000 membres et habituée à ruer dans les brancards. La fonction pourrait le prédestine­r à une brillante carrière: avant lui, Gerhard Schröder ou Andrea Nahles, pressentie pour succéder à Martin Schulz à la tête du SPD, ont occupé ce poste d’agitateur interne.

La salle est comble ce mardi. Quelque 300 sympathisa­nts se pressent pour occuper les rares chaises mises à dispositio­n. La moitié de l’auditoire a moins de 30 ans. Quinze à 20 personnes déclarent à main levée être entrées dans le parti depuis le début de l’année pour suivre l’appel de Kevin Kühnert «Tritt ein, sag’ Nein» («entre, dis non»). En quelques semaines, le parti a ainsi gagné 25000 nouveaux membres. Comme Jürgen, 59 ans, «né dans une famille sociale-démocrate», jusqu’à présent inactif en politique, mais «décidé à dire non à la Grande Coalition». Ou encore Julius, jeune homme roux entré dans le parti pour dire «non, car l’Europe et l’Allemagne ont mérité mieux que ce contrat de coalition».

Kevin Kühnert prend la parole après ce rapide tour de l’auditoire. Concentré, l’oeil vif, le débit rapide, le geste rare, il déroule un argumentai­re bien rodé… «Pourquoi assume-t-on ses responsabi­lités en votant non? C’est vrai, le SPD a obtenu un maximum dans ses négociatio­ns avec la CDU. Mais je vois la longue liste des revendicat­ions sociales-démocrates que la CDU est parvenue à bloquer, comme la garantie de retrouver un temps plein après un passage au temps partiel, la fin du système de santé à deux vitesses ou un engagement clair sur le niveau des retraites à long terme… Et puis, n’oubliez pas que lors de la dernière Grande Coalition, bien des projets qui figuraient dans le contrat de coalition n’ont finalement pas été adoptés, à la suite du blocage de la CDU. Sur le papier, ce sont des points qui figurent comme de bonnes intentions – les objectifs climatique­s par exemple – mais qui, au final, ne sont pas adoptés parce que le financemen­t n’est soi-disant pas possible. Ce n’est pas parce qu’un projet figure dans l’accord qu’il sera réalisé!»

La direction en cause

La salle applaudit longuement. «D’accord, mais quelle est l’alternativ­e à une Grande Coalition?» interroge une militante, inquiète des derniers sondages qui créditent le SPD de 15 à 16% des intentions de vote, avec un à deux points d’avance seulement sur l’extrême droite de l’AfD. «Selon les sondages, en cas de nouvelles élections, ça ne suffirait même pas pour une Grande Coalition» puisque la CDU a elle aussi reculé, rappelle cette enseignant­e de 56 ans. «Je suis contre la politique de la peur, rétorque Kevin Kühnert. Avec ces scénarios catastroph­e, autant fermer la boutique! Dire non ne veut pas dire qu’il y aura d’élections. On peut contraindr­e Merkel à gouverner à la tête d’un gouverneme­nt minoritair­e!»

Le public s’enflamme. A l’image de Kerstin, membre du SPD depuis dix-sept ans: «Seul le président de la République peut décider de convoquer de nouvelles élections. Et il fera tout pour l’éviter, car lui non plus ne veut pas d’un raz de marée de l’AfD. Le problème, ce n’est pas les élections, c’est la direction de ce parti…» Et d’enchaîner sur la guerre de succession aux allures de tragicoméd­ie qui se joue depuis des semaines entre le rival malheureux de Merkel, Martin Schulz, le toujours ministre des Affaires étrangères Sigmar Gabriel, l’ancienne ministre du Travail Andrea Nahles et le maire de Hambourg Olaf Scholz.

«On n’en veut plus de cette direction, qui semble se répartir les postes et le pouvoir sans consulter la base», souffle Christian, dépité. Cet étudiant de 22 ans, membre des Jusos depuis l’âge de 16 ans, verrait bien Kevin Kühnert prendre le pouvoir à la tête du parti, «pour faire le grand ménage». ▅

«Ce n’est pas parce qu’un projet figure dans l’accord qu’il sera réalisé!»

KEVIN KÜHNERT

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(JENS-ULRICH KOCH/GETTY IMAGES)

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