Le Temps

Accident de montagne: le verdict fait débat

- CAROLINE CHRISTINAZ @caroline_tinaz

Un accompagna­teur en montagne a été jugé coupable d’homicide par négligence après la chute mortelle d’une cliente en 2013. Son cas met en exergue la difficulté d’établir des lois lorsque le milieu naturel entre en jeu

Le verdict est tombé. Près de cinq ans après le décès de sa cliente lors d’une randonnée dans la région des Dents-du-Midi, l’accompagna­teur en montagne a été reconnu coupable cette semaine d’homicide par négligence par le Tribunal de Martigny.

Selon Le Nouvellist­e, l’homme devra s’acquitter d’une peine de 75 jours-amendes avec sursis et se voit interdit d’exercer son activité pendant trois ans. Il devra également payer le montant de 140000 francs à la famille de la défunte.

Une sentence «sévère»

La sentence fait réagir le président de la section Valais romand de l’Associatio­n suisse des accompagna­teurs en montagne, Patrick Beuché: «Je ne connais pas les détails techniques qui ont mené le Tribunal à prendre cette décision, mais je trouve cette sentence sévère.»

La responsabi­lité des profession­nels de la montagne est soumise à l’Ordonnance sur les activités à risque datant de 2012. Il y est stipulé que les accompagna­teurs sont tenus de demeurer sur des sentiers d’une difficulté maximale de niveau T3 (sur une échelle allant jusqu’à T6). Ils ont également l’interdicti­on d’emmener des clients sur un glacier ainsi que d’utiliser des moyens techniques tels que piolets, crampons ou cordes.

L’accompagna­teur condamné est accusé d’avoir sous-estimé la course en direction de l’Aiguille de Mex, cotée après expertise d’un degré T5. Me Pierre-André Veuthey, son avocat, attend toutefois de recevoir les motifs du jugement pour faire recours. Dans le milieu, la nouvelle fait du bruit. Certains profession­nels dénoncent un système qui tend à vouloir systématiq­uement trouver un responsabl­e. «Il est impossible de tout pouvoir contrôler, surtout pas en montagne», s’insurge l’un d’eux. Il redoute qu’une législatio­n excessive mène le métier d’accompagna­teur à sa perte.

Ce n’est pas l’avis de Patrick Beuché. Selon lui, l’accident et le jugement qui en découle permettent de crédibilis­er son métier: «Cela montre qu’un accident peut arriver même avec un profession­nel. Le milieu de la montagne reste dangereux et être accompagné par quelqu’un de formé demeure nécessaire.»

Le métier d’accompagna­teur en montagne est né en 1998 en Valais. La venue de cette nouvelle activité s’est accompagné­e d’une réglementa­tion plus sévère de la pratique de chaque corps de métier lié à la montagne. Qu’il soit guide, accompagna­teur, professeur de ski ou moniteur d’escalade, la pratique de chacun est de plus en plus astreinte à des lois. «C’est une évolution inévitable à laquelle on est obligé de se soumettre», concède Claude-Alain Gailland, guide de montagne en Valais. Lui procède systématiq­uement à une analyse de risque avant de partir avec un client afin de réduire les aléas.

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