L’argent de la corruption vénézuélienne en Suisse
Credit Suisse abriterait des comptes d’ex-hauts responsables du pays latino-américain inculpés pour corruption par le Département américain de la justice. La Finma enquête sur le volet suisse d’un scandale évalué à un milliard
Plusieurs banques suisses auraient accueilli des fonds venant d'une affaire de détournement de fonds au Venezuela, qui n'est pas sans rappeler le scandale Petrobras au Brésil. Selon le Département américain de la justice (DoJ), les montants impliqués atteindraient jusqu'à un milliard de dollars au total, dont une partie reposerait en Suisse.
En octobre, quatre hauts responsables vénézuéliens ont été arrêtés en Espagne à la demande des autorités américaines, dont un ancien vice-ministre de l'Energie du gouvernement Chávez, Nervis Villalobos Cardenas. Ils étaient accusés d'avoir détourné les fonds de la compagnie pétrolière nationale du Venezuela (PDVSA), dont une partie, évaluée à 27 millions, aurait été blanchie en Suisse.
Cinq personnes visées
La semaine dernière, le Département américain de la justice a inculpé les quatre personnes, ajoutant un cinquième complice toujours en fuite, de blanchiment d'argent et d'association de malfaiteurs. Les cinq Vénézuéliens auraient exigé des pots-de-vin entre 2011 et 2013 à des fournisseurs contre leur aide pour obtenir des contrats avec PDVSA et la priorité dans le paiement des factures lorsque l'entreprise s'est trouvée à court de liquidités.
D'après le Tages-Anzeiger de mercredi, c'est Credit Suisse qui aurait accueilli une partie des fonds. La banque a refusé de commenter ce cas, précisant qu'elle dispose de mécanismes de contrôle interne pour lutter contre la criminalité financière.
L'Office fédéral de la justice, qui dit avoir reçu des demandes d'entraide venant des Etats-Unis, a demandé des informations à une vingtaine de banques, dont il ne donne pas les noms, et a bloqué plus de 100 millions dans deux cas de corruption liés à PDVSA depuis 2014. Des cas «qui concernent les mêmes faits mais différentes personnes», précise un porte-parole.
Similaire à l’affaire FIFA
La Suisse a remis 51 millions aux autorités américaines fin 2016 et la collaboration se poursuit. Ces deux procédures d'entraide juridique ont une «dimension proche de celle de l'affaire qui a secoué la FIFA. Il est question de la levée de la transmission de preuves d'une étendue équivalant à plusieurs centaines de classeurs fédéraux», ajoute le porte-parole.
Les accusés ne se seraient pas adressés directement à Credit Suisse. Ils auraient été aidés par une société de gestion identifié par le DoJ comme la «Swiss Company A». D'après un nouvel article du Tages-Anzeiger ce jeudi, il s'agirait d'Eagle Wealth Management. Contactée, la société zurichoise ne commente pas l'affaire. «En tant qu'entreprise régulée, nous nous conformons à toutes les régulations applicables en tout temps», a-t-elle précisé.
Enquête de la Finma
De son côté, la Finma, le régulateur helvétique, a ouvert une enquête sur plusieurs banques qu'elle ne nomme pas à ce stade. Elle cherche à mesurer l'implication des institutions suisses dans cette affaire et à vérifier que les mesures anti-blanchiment sont correctement appliquées. Son enquête se penchesur divers cas en Amérique du Sud.
PDVSA est la source principale de revenus pour le gouvernement vénézuélien. Hugo Chávez avait remanié sa direction en 2002 pour y installer des fidèles de son régime. Selon un rapport du parlement vénézuélien, 11 milliards de dollars auraient été détournés entre 2004 et 2014.
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