Pierin Vincenz, banquier sous le «choc»
Le Ministère public zurichois enquête sur l’ancien patron de Raiffeisen depuis une plainte déposée en décembre par Aduno, qu’il présidait. Raiffeisen, qu’il a dirigée pendant seize ans, vient également de porter plainte. Pierin Vincenz dit n’avoir «rien f
On avait cru l’affaire enterrée. Le 21 décembre dernier, la Finma annonçait mettre fin à son enquête sur Pierin Vincenz. L’ancien patron de Raiffeisen, sur lequel l’autorité de régulation investiguait pour d’éventuels conflits d’intérêts, venait de se retirer du conseil d’administration d’Helvetia, son dernier mandat encore existant dans la finance. La Finma jugeait donc sa procédure caduque, la garantie d’une activité irréprochable dont les responsables bancaires doivent pouvoir se targuer n’étant plus nécessaire.
Affaire classée, donc, sans que l’on puisse savoir si Pierin Vincenz s’était rendu coupable d’une quelconque malversation, ou non. C’était compter sans le conseil d’administration d’Aduno, dont Raiffeisen détient 25,5% et que le banquier avait dirigé jusqu’en juin dernier. Le jour même où la Finma rangeait son dossier, le prestataire de services financiers rendait visite à la justice zurichoise et déposait plainte pénale contre son ancien président.
Perquisitions mardi matin
Aduno avait aussi mené sa petite enquête, mandatant en novembre dernier le cabinet d’avocats Baumgartner Mächler pour examiner l’aspect légal de plusieurs acquisitions du groupe ces dernières années. C’est à la suite de cet examen que le conseil d’administration a décidé de porter plainte contre son ex-président et un autre ancien membre du conseil pour «gestion déloyale», révèle un communiqué diffusé mercredi par Aduno, qui insiste, néanmoins, sur «la présomption d’innocence».
C’est ainsi que la police zurichoise s’est retrouvée mardi au petit matin à toquer à la porte de l’ancien banquier star, qui a dirigé Raiffeisen pendant seize ans, pour procéder à une perquisition à l’improviste. Sous le «choc» devant ses visiteurs, l’ex-patron s’est dit «totalement surpris et étonné de l’enquête criminelle» dont il fait l’objet.
Vingt-quatre heures plus tard, mercredi matin, le Ministère public zurichois a rendu sa démarche publique. L’institution explique avoir ouvert une procédure pénale contre Pierin Vincenz, qu’elle soupçonne de gestion déloyale lorsqu’il présidait le prestataire zurichois de services financiers Aduno.
Pierin Vincenz «nie avec véhémence»
Le principal intéressé, lui, ne voit pas le problème. «Je nie avec véhémence les allégations lancées contre moi et contre lesquelles je vais me défendre avec tous les moyens à disposition», a ajouté Pierin Vincenz. «J’ai toujours respecté les intérêts des entreprises pour lesquelles j’ai travaillé et je suis convaincu que je n’ai rien fait de mal.»
Outre l’ex-patron de Raiffeisen et l’autre ancien membre du conseil d’Aduno, trois autres personnes figurant dans son «entourage professionnel» sont concernées, selon le Ministère public zurichois, qui ne donne pas leur identité. Ce dernier, ainsi que son homologue saint-gallois, a perquisitionné mardi les logements et les bureaux des cinq accusés et mis la main sur des documents. Les interrogatoires des cinq personnes se poursuivent et le Ministère devait décider de la suite de la procédure.
Nouvelle plainte
L’ex-patron s’est dit mercredi «totalement surpris et étonné de l’enquête criminelle» dont il fait l’objet
L’affaire se corse encore pour le banquier déchu. Mercredi également, Raiffeisen a décidé de se constituer partie civile et de déposer une «plainte pénale à l’encontre de Pierin Vincenz et de toute autre personne potentiellement impliquée». Dans un communiqué publié dans le sillage de celui de la justice zurichoise, la banque, qui s’était également retrouvée sous enquête de la Finma, dit saisir «le soupçon de gestion déloyale et les nouveaux indices du Ministère public comme une opportunité pour obtenir toute la lumière sur les événements passés».
Les faits reprochés au Grison de 61 ans ne sont pas tout à fait clairs. Selon plusieurs bribes d’informations, non confirmées, qui ont filtré dans la presse depuis septembre dernier, des prises de participation se trouveraient au coeur du problème. Il s’agirait notamment de Commtrain Card Solutions en 2007. Pierin Vincenz aurait pris une participation avant qu’Aduno ne le fasse afin d’encaisser une plus-value. Une pratique – si elle est avérée – appelée front-running et interdite en Suisse. L’acquisition de la société Investec, dont Raiffeisen vient de se séparer, suscite également des questionnements. On connaîtra donc peut-être le fin mot de cette affaire.
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