Label + romand: plus d’argent, plus de tourments
«Luxe, calme» est l’une des deux productions lauréates 2016 de ce nouveau fonds. Explications du dispositif et controverse.
Ce n’est pas un soutien de débutant. Pour tenter le concours Label+ romand, importante aide à la production et à la diffusion lancée en 2010, il faut avoir déjà cinq ans d’expérience et trois créations dans son giron. Par ailleurs, la compagnie postulante doit bénéficier d’un lieu de production et d’une tournée parcourant au moins trois cantons. Quatre désormais, car le dispositif vient de s’ouvrir à tous les arts de la scène et changer son règlement…
On rembobine et on explique. Label+ romand est un fonds créé et financé par tous les cantons romands – Berne compris – qui vise à soutenir un spectacle ambitieux susceptible d’avoir un rayonnement en Suisse et à l’étranger. Son jury est composé de professionnels du terrain (directeurs de théâtre ou d’école dramatique, dramaturge, journaliste, etc.) et d’administratifs de la culture.
DE DEUX À TROIS LAURÉATS
Initialement, deux lauréats recevait 200 000 francs tous les deux ans – le concours est biennal. Désormais, le label est ouvert à la danse ainsi qu’aux arts du cirque et allouera tous les deux ans 140 000 francs à trois productions. Depuis sa création, Label + a soutenu, dans l’ordre, des travaux de François Gremaud, Oscar Gómez Mata, Massimo Furlan, Denis Maillefer, Alexandre Doublet, Yan Duyvendak et, à nouveau en 2016, Oscar Gómez Mata ainsi que Mathieu Bertholet.
Une belle contribution à un travail d’exception. «Oui, mais», répondent les détracteurs. Préférant rester discrets, ces déçus regrettent que tous les spectacles relèvent de la même veine, disons contemporaine. Ils déplorent également qu’un même artiste ait déjà reçu deux fois la manne providentielle alors que la Suisse romande compte plus de 300 compagnies actives… Enfin, ils comprennent mal que Label + ait soutenu Luxe, calme, alors que ce spectacle est notamment coproduit par Vidy-Lausanne et la Comédie de Genève, les deux poids lourds locaux.
VARIÉTÉ ESTHÉTIQUE
Jérôme Benoît, chef de la section francophone de l’Office de la culture du canton de Berne, est le président de Label +. Il a lui-même reçu pareilles doléances et les comprend. «J’ajouterais même une certaine amertume des cantons périphériques qui digèrent mal que seules des compagnies lémaniques aient bénéficié de cette aide jusqu’à présent…» Quelles solutions dès lors pour rééquilibrer la donne? «Déjà, le jury a été modifié de sorte à représenter plus de sensibilités esthétiques, explique le président. Ensuite, nous sommes en train d’envisager la possibilité d’exclure les grandes institutions comme bénéficiaires de Label. Enfin, la tournée étendue à quatre – au lieu de trois – cantons permettra une meilleure couverture de la Suisse romande.» En revanche, Jérôme Benoît ne voit aucun problème à récompenser une compagnie plusieurs fois: «La qualité l’emporte sur les quotas.»
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