Trump bâtit un mur contre ses partenaires commerciaux
ÉCONOMIE
Indignation générale après l’annonce de surtaxes américaines sur l’acier et l’aluminium. Bruxelles prépare des mesures de rétorsion, même si c’est la Chine que le président américain a dans son viseur – alors même que les exportations de Pékin vers les Etats-Unis sont moindres que celles de l’UE ou du Canada.
Comme avec le charbon, le président américain entend venir en aide à une industrie de l’acier et de l’aluminium plutôt marginale en termes d’emplois, au risque de pénaliser gravement d’autres secteurs. Les républicains sont furieux
La décision de Donald Trump d’imposer des taxes douanières de 25% sur l’acier et de 10% sur l’aluminium provoque d’énormes remous aux Etats-Unis. Pour nombre d’économistes et surtout d’élus républicains, le président américain joue avec une économie pourtant en bonne santé, avec une croissance moyenne de 3% au cours des neuf derniers mois.
Dans un éditorial, le Wall Street Journal(WSJ) se dit très inquiet de cette «folle» décision. Les i ndustries utilisatrices d’acier emploient 6,5 millions de personnes outre-Atlantique. Elles seront fortement affectées par ces nouvelles taxes douanières.
Les secteurs des transports, dont les secteurs aéronautique et automobile, comptent pour 40% de la consommation d’acier aux Etats-Unis, et l’industrie de l’emballage et de la construction pour respectivement 20% et 15%. Ils ne seront pas épargnés.
Flatter sa base électorale
Si Barack Obama a été perçu comme le sauveur de l’industrie automobile après les risques de faillite de General Motors et de Chrysler en 2009, Donald Trump «offre un énorme cadeau aux constructeurs automobiles étrangers», déplore le WSJ. On reproche au locataire de la Maison-Blanche de n’agir qu’en fonction de sa base électorale, dont les milieux ouvriers de l’Ohio, de Pennsylvanie et du Michigan.
Ces travailleurs, tant démocrates que républicains, ont subi les effets de la globalisation et de l’avènement de la puissance économique chinoise. Ils ont beaucoup voté pour Donald Trump à la présidentielle de 2016. L’Ohio a perdu, ces deux dernières années, 1500 postes de travail dans le secteur de l’acier.
Rob Portman, sénateur républicain de cet Etat du Midwest, craint toutefois que les taxes douanières pénalisent les constructeurs automobiles installés en Ohio ainsi que d’autres industries dépendant de l’acier et de l’aluminium. Le sénateur républicain du Nebraska, Ben Sasse, n’est pas moins critique. Pour lui, la décision de Donald Trump équivaut à une «augmentation massive des impôts pour les familles». Les consommateurs américains seront parmi les premières victimes. Les représailles commerciales de l’étranger pourraient toucher notamment des produits comme le bourbon, les voitures, les motos, voire les produits agricoles.
Chine peu affectée
Les Etats-Unis importent pour 22,5 milliards de dollars d’acier et en exportent pour 12,9 milliards. Ils importent surtout du Canada (16%), du Brésil (13%) et du Mexique (9%). Malgré la rhétorique très anti-chinoise de Donald Trump, la Chine sera peu affectée. Elle n’est que le onzième exportateur d’acier vers l’Amérique (2,2%).
La moitié des exportations américaines d’acier ont pour destination le Canada, qui peste déjà. Cette nouvelle taxe douanière pourrait fortement entraver la renégociation voulue par Donald Trump du traité de libre-échange Aléna avec le Canada et le Mexique.
Ex-président de la Banque mondiale, Robert Zoellick avertit: «De telles mesures risquent de déclencher une escalade dont on peut perdre le contrôle.» Et politiquement, le «globaliste» Gary Cohn, conseiller économique en chef de Donald Trump, pourrait claquer la porte de la Maison-Blanche. Il s’est fermement opposé à ces taxes douanières. Il a perdu.
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