A La Sallaz, une joie retenue
Après plusieurs mois d’intense battage médiatique, l’initiative «No Billag» a finalement été refusée par la population. Les collaborateurs de la RTS saluent un heureux épilogue, sans ignorer les réformes à venir
Un technicien lève discrètement les bras au ciel alors que le résultat tombe: «L’initiative «No Billag» est désormais officiellement refusée.» Pas d’effusion particulière au siège lausannois de la radio romande, à La Sallaz, depuis lequel nous suivons les résultats des votations ce dimanche. La retenue affichée s’explique en partie par la présence de journalistes d’autres médias. Dans un mail interne, les employés ont en effet été invités à avoir le triomphe modeste. Trop se réjouir pourrait être interprété comme de l’arrogance, craint la direction.
Tout est comme d’habitude
«L’apéro est le même que d’habitude pour un week-end de votations. Il n’y a pas plus», précise dès notre arrivée Fanny Eternod, chargée des relations médias à la RTS. Quelques ramequins, des sandwichs végétariens et un ou deux plateaux de viande séchée. Tout de même un peu de vin rouge. Une employée glisse que par rapport au dernier dimanche de votations, il y a même «un peu moins». Pas question de donner l’impression de dépenser l’argent du service public en bouteilles de champagne. Les effectifs déployés sont d’ailleurs également «similaires aux autres votations, la tension dans le bureau aussi», explique Laurent Caspary, rédacteur en chef radio. Rien de spécial, vraiment?
«Besoin de souffler»
La présence de médias externes à la rédaction est toutefois manifestement inhabituelle. Et suscite une raideur palpable. La cafétéria du personnel est exceptionnellement ouverte pour l’occasion et accueille les collaborateurs venus suivre les résultats entre collègues. Elle se trouve cependant hors de notre périmètre autorisé. Une Securitas indique à ce titre être là pour «nous garder à l’oeil». Il serait de toute façon difficile d’échapper à l’attention des communicantes désignées pour nous assister, particulièrement attentives aux déplacements des journalistes externes en début de journée. «Ça n’a pas été facile tous les jours pour nos employés, explique par téléphone Pascal Crittin, le directeur de la RTS. Nos équipes ont besoin de souffler.» Travailler à la RTS semble de fait avoir demandé une certaine capacité de résilience ces derniers mois.
«Mon dentiste m’a accueillie en me signalant qu’il était mieux de ne pas lui demander ce qu’il avait voté», témoigne une journaliste, «contente qu’on en finisse». Un autre collaborateur indique, lui, avoir «surveillé toutes ses dépenses» pour ne pas «donner l’impression de vivre une vie de luxe». «Les derniers mois ont été vraiment longs», ajoute une troisième employée. Un ancien de la maison se dit conscient d’avoir vécu «les belles années de la SSR». Il dénonce «l’armée mexicaine» qu’est devenu le service public, qui compterait selon lui trop de cadres.
«Le début de l’effort»
Le démantèlement est désormais évité, mais ce n’est que le «début de l’effort», souligne une collaboratrice. Des économies sont en effet nécessaires et le spectre des licenciements plane sur le service public, qui devra subir une cure d’amaigrissement d’ici à 2019. «100 millions doivent être économisés», explique Pascal Crittin.Fier de ses équipes, il déclare «savourer la victoire» et salue l’exercice d’équilibrisme qu’a été celui de couvrir un objet dont l’issue décidait de la survie de l’entreprise. «Tout sera fait pour éviter au maximum de toucher au personnel dans les réformes futures», assure-t-il. Présente sur place, une éditrice web de la RTS s’enquiert tout de même des effectifs actuels au Temps. On ne sait jamais.
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