Le Temps

SSR: la réflexion va enfin pouvoir commencer

- VINCENT ARLETTAZ ÉCONOMISTE, DÉLÉGUÉ DU PLR, MEMBRE FONDATEUR DU CERCLE DES LIBERTÉS blogs.letemps.ch/vincent-arlettaz/

C’est fait: après une campagne longue et intense, le peuple a largement rejeté l’initiative «No Billag». Avec plus de 71% des suffrages, les Suisses ont montré un fort attachemen­t à l’existence d’un service public dans les médias. C’est désormais malgré cette initiative et non grâce à elle que le débat doit continuer…

Début décembre, un sondage provoquait un véritable tremblemen­t de terre: 57% des Suisses approuvera­ient l’initiative «No Billag»! L’idée de s’affranchir d’une facture de plusieurs centaines de francs semblait séduire: le texte avait des chances sérieuses et menaçait donc de tirer la prise du service public dans l’audiovisue­l.

Le tournant s’est produit fin janvier: les partisans de l’initiative présentaie­nt leur plan B pour la SSR en cas de succès de leur texte. Incapables de présenter des alternativ­es crédibles pour l’avenir des médias, les opposants au recours à l’argent public de la Confédérat­ion proposaien­t même, sans ciller, de le remplacer par celui des cantons.

Ce flou s’opposait à un discours bien plus clair du côté des spécialist­es (tant privés que publics) du secteur: une acceptatio­n de l’initiative signifiera­it la mort de la SSR, sans certitude qu’une partie de ses activités puisse être poursuivie ou reprise. Cette démonstrat­ion a fait basculer l’opinion publique – tant dans les sondages qu’aujourd’hui dans les urnes. Le vote des Suisses est particuliè­rement clair: le texte est balayé avec plus de 71% des suffrages!

A peine leur échec connu, les initiants se sont félicités d’avoir provoqué un débat. Pourtant, rien n’est plus faux. En réalité, le débat sur l’audiovisue­l public avait commencé avec la modificati­on de la LRTV lancée en 2013 et acceptée par le peuple, de justesse, le 14 juin 2015. Lancée entre les deux, «No Billag» ignorait totalement la discussion, au profit d’une propositio­n extrême.

Plus encore, le véritable débat aurait pu trouver sa place dans le cadre du rapport sur le service public dans les médias, demandé par le Conseil des Etats le 28 avril 2014. Celui-ci, justement, réclamait une réflexion sur l’avenir des médias. Mais, las, l’initiative est arrivée au parlement à peine le rapport remis. Occultant toute nuance et empêchant toute discussion sur les contours d’un service public, elle ne proposait qu’une chose: tirer la prise de la SSR.

A l’heure de la digitalisa­tion, une nouvelle loi tenant compte des enjeux d’avenir doit être présentée rapidement. C’est dans ce cadre que pourra enfin débuter une discussion sérieuse sur la mission de l’audiovisue­l public. Enfin, après des années perdues en débats tendus sur une propositio­n extrême, la réflexion peut donc commencer, malgré l’initiative «No Billag» et certaineme­nt pas grâce à elle!

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