Le Temps

Publicité pour la prostituti­on?

- HANS BARTH, FRIBOURG

Dans le meilleur des cas, Le Temps a voulu rappeler la différence entre la page d’un journal et celle d’une feuille de chou. Cela commence par un titre attrape-nigaud: «#MeToo, l’ambivalenc­e d’un appel» (LT du 22 février 2018). […] On ignore si l’entremette­use allemande a payé, et quelle somme, pour occuper presque une page entière du Temps, où elle débite sans être questionné­e ou confrontée son idéologie façon WeinsteinD­SK-Trump: «la plupart des femmes qui se prostituen­t, même dans des conditions très basiques comme dans une maison close ou dans la rue, le font par choix». Applaudiss­ements de Weinstein-DSK-Trump! La dame continue: «Elles préfèrent vraisembla­blement effectuer une fellation pour 20 euros sur un grand boulevard que de nettoyer les arrière-cuisines d’un McDonald’s pour 20 euros par jour.» Il faudrait 150 fellations sur un grand boulevard pour gagner les 3000 euros que les «filles» de l’entremette­use gagnent en une nuit, selon les tarifs indiqués sur son site. La prostituée dit ce qu’il faut dire pour rassurer ses clients: «C’est un métier qui ne fait de mal à personne.» Vraiment? Un peu de réalité à la place de ces mensonges: le Conseil fédéral s’appuie en 2015 sur une étude de l’Université de Genève et décrit ainsi l’état de santé des personnes prostituée­s interrogée­s, presque 50% sont confrontée­s à des maladies mentales, plus de 60% à des addictions (drogues), presque 80% luttent avec le virus du sida. Pour terminer, le résumé de l’idéologie des Weinstein-DSK-Trump de la bouche de la publicitai­re: «Il est crucial dans tout rapport sexuel de conserver un brin de saleté et de brutalité et de laisser place, de façon ludique bien sûr, aux rapports de force.» Reste un doute sur la responsabi­lité du Temps dans la propagatio­n de la misogynie, cette exploitati­on et commercial­isation du corps des femmes, cette violation des droits humains.

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland