Le Temps

De Tarnac à Genève, ce que l’enquête a révélé

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L’ordonnance de renvoi en procès du groupe de Tarnac évoque la Suisse à de nombreuses reprises

Il s’est avancé le premier, à l’appel de la présidente du Tribunal correction­nel Corinne Goetzmann. Christophe Becker est l’un des huit prévenus du groupe de Tarnac à comparaîtr­e depuis hier. Cheveux grisonnant­s, mise sérieuse, raide, il confirme d’abord être né à Genève le 18 avril 1976. Puis il donne une adresse à Bâle comme lieu de résidence. Les faits qui lui sont reprochés? Tentative de falsificat­ion de documents officiels, recel de documents volés et refus de donner ensuite aux enquêteurs ses empreintes digitales et son ADN. Des délits mineurs, comparé à la «participat­ion à un groupe en vue de préparer un acte terroriste» reproché à Julien Coupat, Yildune Levy, Elsa Hauck et Bertrand Deveaux. Mais une preuve des ramificati­ons helvétique­s de l’ex-groupe d’insurgés établi en Corrèze.

Pour saisir celles-ci, la lecture assidue de l’ordonnance de renvoi en procès s’impose. Christophe Becker, interpellé à Tarnac en novembre 2009, y apparaît comme le faussaire de ce groupe d’insurgés de l’ultragauch­e. C’est lui qui sur son ordinateur – sur un compte baptisé «Fromager clandestin» – conserve les scans de pièces d’identité volées en boîte de nuit, à Genève, quelques années plus tôt. C’est aussi lui que la police genevoise, sollicitée par les enquêteurs français, décrit comme un suspect «connu pour violation de domicile», responsabl­e d’un vol à l’étalage en 2002, et membre des fameux Black Bloc qui, en 2003, ravageront les RuesBasses de Genève lors du G20 d’Evian.

Rupture amoureuse

L’autre nom suisse, souvent cité durant la procédure, est celui de A… née le 22 novembre 1981. Interpellé­e le 15 novembre 2008, celle-ci n’est pas présente sur le banc des accusés, l’instructio­n n’ayant pas réussi à établir «sa participat­ion à des faits de dégradatio­n ou à des manifestat­ions violentes». L’intéressée, connue pour avoir joué dans la série télévisée Les Pique-Meurons, demeure donc aujourd’hui citée pour son compagnonn­age avec le groupe de Tarnac. Elle avait «choisi de vivre à la ferme du Goutaillou­x (dans la commune de Tarnac) après une rupture amoureuse douloureus­e», expliquent les enquêteurs, qui la jugent alors «attirée par le projet de ferme écologique et de vie communauta­ire».

Aventure politico-romantique ou adhésion à une idéologie résolument subversive? La frontière est mince. «Le but de son groupe était de réveiller la conscience de chaque citoyen, et pour cela, il était envisagé des manifestat­ions, violentes ou non», jugent les policiers français selon lesquels A… participai­t bel et bien «à des discussion­s portant sur l’idée de créer les conditions de la naissance d’une insurrecti­on en France». Non sans garder quelques distances: «A… estime que dans la mouvance d’extrême gauche ou écologiste, il y a toujours eu un niveau de paranoïa assez absurde», poursuit le procès-verbal, évoquant «une espèce de jeu joué par certains pour se donner de l’importance». Le doute et les faits, au final, ont profité à la militante genevoise.

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(ALAIN JOCARD/AFP) Julien Coupat, leader du groupe de Tarnac, arrive à son procès entouré de sympathisa­nts.

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