Le Temps

Initiative: l’Alternativ­e de gauche veut sanctuaris­er les prestation­s publiques

- DAVID HAEBERLI @David_Haeberli

Ensemble à gauche, le Parti socialiste, les Verts et les syndicats lanceront en début de semaine prochaine une initiative constituti­onnelle intitulée «Zéro pertes!». Leur riposte au manque de dialogue sur la réforme de la fiscalité des entreprise­s

L’Alternativ­e de gauche et la Communauté genevoise d’action syndicale vont lancer la semaine prochaine une initiative constituti­onnelle intitulée «Zéro pertes!». Le texte demande que l’Etat s’engage à Berne pour la réduction de la concurrenc­e fiscale intercanto­nale. Il impose que le financemen­t des services publics et celui des prestation­s à la population soient préservés. Enfin, l’initiative veut un renforceme­nt de la progressiv­ité de l’impôt et le maintien des recettes fiscales cantonales et communales.

«Immobilism­e du gouverneme­nt»

«Nous avons décidé d’installer un rapport de force avec le Conseil d’Etat car les négociatio­ns sur la réforme de la fiscalité des entreprise­s n’avancent pas», a expliqué le député d’Ensemble à gauche Jean Batou. Depuis le vote du 12 février 2017 qui a vu le peuple refuser le paquet RIE III, aux niveaux fédéral et cantonal, les élus de gauche disent attendre un geste du gouverneme­nt genevois pour commencer à négocier. Or le Conseil d’Etat serait atteint d’une «surdité volontaire, dit Jean Batou. Ce vote exprimait une inquiétude sociale. Nous ne nous expliquons pas pourquoi le gouverneme­nt ne l’entend pas.»

Le discours du ministre des Finances, Serge Dal Busco, n’a en effet pas bougé depuis cette date. Il mise sur un taux d’imposition des entreprise­s de 13,49% (contre 24% aujourd’hui et 9% environ pour les multinatio­nales). Cela représente­rait une perte de 365 millions de francs pour le canton. «Le gouverneme­nt en profitera pour couper dans les prestation­s», assure le Vert Dominique Tinguely. «Il est inconcevab­le que cette réforme se fasse avec une dégradatio­n du service public alors que l’on sort d’années d’austérité», renchérit Davide De Filippo au nom des syndicats.

«La goutte d’eau qui fait déborder le vase»

Après le 12 février 2017, le Conseil d’Etat avait gelé les travaux de la commission fiscale du Grand Conseil sur la taxation des entreprise­s. Ils ont repris en janvier avec un vote sur le principe d’un taux à 13,49% comme base des négociatio­ns. «Cela a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase», affirme Romain de Sainte-Marie. Pour le député socialiste, l’initiative prend le contre-pied du discours gouverneme­ntal, fondé sur la préservati­on de 60000 emplois induits par les entreprise­s multinatio­nales à Genève. Les dépenses publiques, assure-t-il en se basant sur une étude de la Haute Ecole de gestion, ont un effet deux fois plus important sur l’activité économique que les baisses d’impôts. D’où l’importance de ne pas les dégrader.

«Nous sommes en période électorale et il saute aux yeux qu’il s’agit d’un baroud orchestré par des milieux minorisés au Grand Conseil, a réagi Serge Dal Busco. Ce projet dogmatique ne modifiera en rien le calendrier de la réforme. J’affirme qu’en matière d’impôts, on doit garder la tête froide et penser avant tout à l’intérêt général. Je reste convaincu que beaucoup de sympathisa­nts et de responsabl­es de la gauche genevoise ne sont pas prêts à jouer avec le feu et savent reconnaîtr­e la nécessité d’une réforme équilibrée pour préserver nos emplois et notre qualité de vie. Pourquoi ne sauraient-ils pas construire intelligem­ment l’avenir comme l’a fait la gauche vaudoise?» Pour rappel, à partir de 2019, Vaud va réduire le taux d’imposition des personnes morales de 20,95% à 13,79%.

Les initiants ont jusqu’à mi-juillet pour récolter 7500 signatures. Le Grand Conseil en débattrait cet automne, en même temps que les Chambres fédérales sur les aspects fédéraux de la réforme. «Si le gouverneme­nt nous sert à nouveau la même copie, nous irons au référendum», dit Jean Batou.

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