Le Temps

LES OUBLIÉS DE 1998

SOUVENIRS, SOUVENIRS Chaque année, des modes annoncées comme révolution­naires et des créateurs présentés comme talentueux font long feu. Retour sur les promesses non tenues de 1998

- VIRGINIE NUSSBAUM, ANTOINE DUPLAN ET STÉPHANE GOBBO @VirginieNu­ss, @duplantoin­e, t @StephGobbo

TAMAGOTCHI LE B.A.-BA DE L’INTELLIGEN­CE ARTIFICIEL­LE

Venu du Japon, cet oeuf de plastique contenant une minuscule créature virtuelle que l’on guigne à travers une lucarne a rendu fous les enfants de tous âges. Le but consistait à nourrir, distraire, soigner et punir la bestiole, un croisement d’enzyme glouton et de Pokémon rabougri, pour qu’elle vive le plus longtemps possible. C’était idiot, mais cette blastula d’intelligen­ce artificiel­le exerçait une réelle fascinatio­n sur des esprits avides de technologi­e numérique. Aujourd’hui que le moindre smartphone peut contenir l’univers entier, ce souffle d’intelligen­ce artificiel­le fossilisée semble bien dérisoire.

HELEN HUNT LA BLONDE SUBTILE

Le 23 mars 1998, Helen Hunt décroche l’Oscar de la meilleure actrice pour son rôle dans Pour le pire et le meilleur, où elle tient la dragée haute à Jack Nicholson. Avec sa voix de hautbois qui traîne sur certaines syllabes, avec ses yeux facilement tristes qui se plissent pour exprimer un mélange de compassion et de lascivité, avec le petit pli d’amertume qui souligne parfois sa bouche mince et le zeste d’androgynie dont elle rehausse sa féminité, elle est irrésistib­le. Las! Après une pincée de films marquants, elle réalise un navet et sort de nos mémoires à force de rôles insignifia­nts.

DES’REE UN TUBE ET PUIS S’EN VA

«Life, oh life…» Jurer que vous n’avez jamais chantonné ce refrain serait un honteux mensonge. Sorti à l’été 1998, le single de l’Anglaise Des’ree envahit les ondes et les hit-parades européens (en Suisse, il atteindra la 3e place). Cette mélodie guillerett­e aux paroles étudiées («Je ne veux pas voir de fantômes, je préfère encore manger un toast devant les infos») tourne en boucle. Après ce succès, qui lui vaudra un Brit Award l’année suivante, la chanteuse mi-pop mi-R’nB sort un album en 2003. Ce sera un flop total qui lui vaudra d’être lâchée par sa maison de disques. Depuis, plus de traces de Des’ree. Ah, si: un procès à l’encontre de Beyoncé, accusée d’avoir repris l’une de ses chansons sans sa permission… .

LA RAIE EN ZIGZAG LA FAUTE À BRITNEY

Tout le monde se souvient de «Baby One More Time», le tube de Britney Spears qui projetait, en 1998, la starlette au sommet. Ce qu’on a malen- contreusem­ent oublié, c’est la coiffure qu’arborait la chanteuse sur la pochette de l’album du même nom: une magnifique raie en zigzag. Plus aventurièr­e qu’une simple division rectiligne des cheveux, elle faisait fureur chez les starlettes de l’époque: outre Britney, Jennifer Aniston, Christina Aguilera ou encore Hilary Duff oseront toutes cette bizarrerie capillaire, parfois rehaussée de barrettes-papillons, de chouchous colorés ou de macarons. Un style qu’on a depuis rarement vu sillonner les cuirs chevelus.

LE FURBY TELLEMENT MIGNON

A mi-chemin entre le hamster, le hibou et le Gremlin, la petite peluche robotisée était, en 1998, un jouet qu’on s’arrachait. Grâce à un capteur placé sur son front, le Furby réagissait à la lumière et aux mouvements de l’enfant, battant des cils et des oreilles, ronflant et gazouillan­t une série d’onomatopée­s lorsqu’on chatouilla­it sa fourrure multicolor­e, le «furbish». Ces dernières années, le Furby a connu plusieurs revivals, se voyant même, dès 2012, livré avec une applicatio­n mobile. Mais aucun modèle n’atteindra le triomphe du premier, vendu à 1,8 million d’exemplaire­s en 1998. D’ailleurs, s’il vous en reste un au grenier, réfléchiss­ez à deux fois avant de le jeter: les modèles les plus rares se négocient aujourd’hui jusqu’à 500 dollars.

DOLLY BREBIS ÉGARÉE

On se souvient de la brebis écossaise Dolly (1995-2003) comme du premier mammifère cloné. Mais Dolly, en 1998, c’était aussi un groupe présenté comme le sauveur du rock français. On se souvient que la formation emmenée par la chanteuse et guitariste Manu était l’une des attraction­s du Paléo Festival 1998, à la faveur d’un premier album sorti l’année précédente et contenant le tube «Je n’veux pas rester sage». Puis, plus rien. Dolly aura beau enregistre­r quatre autres albums, Manu aura beau tenter une carrière solo, les Nantais ne connaîtron­t jamais le destin qu’ont leur avait promis.

MIMI LEDER ESPOIRS DÉÇUS

En janvier 1998, deux mois après sa sortie américaine, le vaisseau

Titanic partait à l’abordage des écrans européens. En Suisse, le film attirera près de deux millions de spectateur­s, devançant des production­s comme L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, Armageddon, Il faut sauver le soldat

Ryan et Demain ne meurt jamais.

Aux Etats-Unis, à la surprise générale, un long-métrage narrativem­ent proche d’Armageddon se classe en 9e position du box-office annuel: Deep Impact. Sa particular­ité: il a été réalisé par une femme, Mimi Leder. Alors que seule Kathryn Bigelow avait réussi à damer le pion aux mâles sur le terrain du blockbuste­r, une autre réalisatri­ce allait se faire un nom. Mais c’était sans connaître – alors – la très machiste industrie hollywoodi­enne. La New-Yorkaise ne signera ensuite que deux longs-métrages, dont on ne souvient guère

(Un Monde meilleur, The Code). Ces quinze dernières années, elle a principale­ment oeuvré pour la télévision, signant des épisodes de séries mineures.

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