LES OUBLIÉS DE 1998
SOUVENIRS, SOUVENIRS Chaque année, des modes annoncées comme révolutionnaires et des créateurs présentés comme talentueux font long feu. Retour sur les promesses non tenues de 1998
TAMAGOTCHI LE B.A.-BA DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
Venu du Japon, cet oeuf de plastique contenant une minuscule créature virtuelle que l’on guigne à travers une lucarne a rendu fous les enfants de tous âges. Le but consistait à nourrir, distraire, soigner et punir la bestiole, un croisement d’enzyme glouton et de Pokémon rabougri, pour qu’elle vive le plus longtemps possible. C’était idiot, mais cette blastula d’intelligence artificielle exerçait une réelle fascination sur des esprits avides de technologie numérique. Aujourd’hui que le moindre smartphone peut contenir l’univers entier, ce souffle d’intelligence artificielle fossilisée semble bien dérisoire.
HELEN HUNT LA BLONDE SUBTILE
Le 23 mars 1998, Helen Hunt décroche l’Oscar de la meilleure actrice pour son rôle dans Pour le pire et le meilleur, où elle tient la dragée haute à Jack Nicholson. Avec sa voix de hautbois qui traîne sur certaines syllabes, avec ses yeux facilement tristes qui se plissent pour exprimer un mélange de compassion et de lascivité, avec le petit pli d’amertume qui souligne parfois sa bouche mince et le zeste d’androgynie dont elle rehausse sa féminité, elle est irrésistible. Las! Après une pincée de films marquants, elle réalise un navet et sort de nos mémoires à force de rôles insignifiants.
DES’REE UN TUBE ET PUIS S’EN VA
«Life, oh life…» Jurer que vous n’avez jamais chantonné ce refrain serait un honteux mensonge. Sorti à l’été 1998, le single de l’Anglaise Des’ree envahit les ondes et les hit-parades européens (en Suisse, il atteindra la 3e place). Cette mélodie guillerette aux paroles étudiées («Je ne veux pas voir de fantômes, je préfère encore manger un toast devant les infos») tourne en boucle. Après ce succès, qui lui vaudra un Brit Award l’année suivante, la chanteuse mi-pop mi-R’nB sort un album en 2003. Ce sera un flop total qui lui vaudra d’être lâchée par sa maison de disques. Depuis, plus de traces de Des’ree. Ah, si: un procès à l’encontre de Beyoncé, accusée d’avoir repris l’une de ses chansons sans sa permission… .
LA RAIE EN ZIGZAG LA FAUTE À BRITNEY
Tout le monde se souvient de «Baby One More Time», le tube de Britney Spears qui projetait, en 1998, la starlette au sommet. Ce qu’on a malen- contreusement oublié, c’est la coiffure qu’arborait la chanteuse sur la pochette de l’album du même nom: une magnifique raie en zigzag. Plus aventurière qu’une simple division rectiligne des cheveux, elle faisait fureur chez les starlettes de l’époque: outre Britney, Jennifer Aniston, Christina Aguilera ou encore Hilary Duff oseront toutes cette bizarrerie capillaire, parfois rehaussée de barrettes-papillons, de chouchous colorés ou de macarons. Un style qu’on a depuis rarement vu sillonner les cuirs chevelus.
LE FURBY TELLEMENT MIGNON
A mi-chemin entre le hamster, le hibou et le Gremlin, la petite peluche robotisée était, en 1998, un jouet qu’on s’arrachait. Grâce à un capteur placé sur son front, le Furby réagissait à la lumière et aux mouvements de l’enfant, battant des cils et des oreilles, ronflant et gazouillant une série d’onomatopées lorsqu’on chatouillait sa fourrure multicolore, le «furbish». Ces dernières années, le Furby a connu plusieurs revivals, se voyant même, dès 2012, livré avec une application mobile. Mais aucun modèle n’atteindra le triomphe du premier, vendu à 1,8 million d’exemplaires en 1998. D’ailleurs, s’il vous en reste un au grenier, réfléchissez à deux fois avant de le jeter: les modèles les plus rares se négocient aujourd’hui jusqu’à 500 dollars.
DOLLY BREBIS ÉGARÉE
On se souvient de la brebis écossaise Dolly (1995-2003) comme du premier mammifère cloné. Mais Dolly, en 1998, c’était aussi un groupe présenté comme le sauveur du rock français. On se souvient que la formation emmenée par la chanteuse et guitariste Manu était l’une des attractions du Paléo Festival 1998, à la faveur d’un premier album sorti l’année précédente et contenant le tube «Je n’veux pas rester sage». Puis, plus rien. Dolly aura beau enregistrer quatre autres albums, Manu aura beau tenter une carrière solo, les Nantais ne connaîtront jamais le destin qu’ont leur avait promis.
MIMI LEDER ESPOIRS DÉÇUS
En janvier 1998, deux mois après sa sortie américaine, le vaisseau
Titanic partait à l’abordage des écrans européens. En Suisse, le film attirera près de deux millions de spectateurs, devançant des productions comme L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, Armageddon, Il faut sauver le soldat
Ryan et Demain ne meurt jamais.
Aux Etats-Unis, à la surprise générale, un long-métrage narrativement proche d’Armageddon se classe en 9e position du box-office annuel: Deep Impact. Sa particularité: il a été réalisé par une femme, Mimi Leder. Alors que seule Kathryn Bigelow avait réussi à damer le pion aux mâles sur le terrain du blockbuster, une autre réalisatrice allait se faire un nom. Mais c’était sans connaître – alors – la très machiste industrie hollywoodienne. La New-Yorkaise ne signera ensuite que deux longs-métrages, dont on ne souvient guère
(Un Monde meilleur, The Code). Ces quinze dernières années, elle a principalement oeuvré pour la télévision, signant des épisodes de séries mineures.