Le Temps

A Melbourne, McLaren passe à l’orange

- LAURENT FAVRE, MONTMELÓ @LaurentFav­re

La saison de F1 redémarre ce week-end en Australie, là où la mythique écurie britanniqu­e, qui a retrouvé sa couleur d’origine, a signé son dernier podium. Il y a déjà quatre ans

La question a un peu surpris Eric Boullier. Le directeur de la compétitio­n chez McLaren a remonté ses lunettes rondes et promené un regard semi-circulaire, comme s’il prenait l’histoire à témoin. Autour de lui, les portraits stylisés d’Ayrton Senna, James Hunt, Alain Prost, Niki Lauda, Mika Häkkinen, Emerson Fittipaldi et Lewis Hamilton, qui ornent la cafétéria de l’écurie britanniqu­e, déployée sur le parking du circuit de Montmeló. «Qu’est-ce que c’est McLaren? Mais c’est ça: plus de cinquante ans de présence en Formule 1, l’écurie la plus titrée après Ferrari, 20 titres mondiaux pilotes et constructe­urs, plus de 180 victoires.»

En perte de vitesse

McLaren, c’est aussi un mythe en perte de vitesse. Un gros budget abonné aux fonds de grille et aux résultats décevants. Avant-dernière du classement des constructe­urs en 2017, l’écurie a mis fin le 15 septembre dernier à trois ans de partenaria­t avec Honda pour tenter un nouveau départ. Les pilotes Fernando Alonso et Stoffel Vandoorne ont désormais un moteur Renault sous leur jolie carrosseri­e papaye, la couleur d’origine. «Il est impératif que McLaren retrouve la place qui est la sienne», a tonné cette semaine l’influent Mansour Ojjeh.

McLaren est donc repartie cet automne «d’une feuille blanche», selon le mot d’Eric Boullier, dans des délais très serrés. «Vous constatez un problème sur une course, vous le testez durant la semaine et, quinze jours plus tard, vous l’adaptez en course. C’est cela la F1, lance Tim Goss, le directeur technique, habitué à travailler dans l’urgence. En fait, il y a eu à l’intersaiso­n moins de changement­s de règlement que l’an dernier. Cela nous donne une certaine stabilité mais oblige aussi à faire un pas en avant en termes de performanc­e.»

Equipé d’un moteur performant, à peine moins puissant que ceux livrés par Mercedes et Ferrari, et d’un châssis considéré comme l’un des meilleurs du plateau, McLaren semblait avoir retrouvé l’ambition en 2018. A Barcelone, la MCL33 n’avait-elle pas signé le deuxième meilleur chrono, inférieur de plus de trois secondes et demie au temps de référence de la MCL32 de 2017? «Je les vois se mêler à la lutte pour les premières places», nous confiait Romain Grosjean.

L’avis du pilote genevois de l’écurie américaine Haas eut le don de plaire à Eric Boullier. «Ben vous voyez…, sourit l’ingénieur français, avant de retrouver rapidement son sérieux. Avec le quatrième budget, nous devrons ne pas descendre à la cinquième place et essayer de viser la troisième.» A Melbourne, McLaren retrouve le circuit de son dernier podium, en mars… 2014. «Nous avons un bon package pour démarrer la saison, mais il serait mauvais de notre part de nous mettre un objectif précis en tête», prévenait à Montmeló le second pilote, Stoffel Vandoorne. Bien vu! Des problèmes de fiabilité – une fois l’hydrauliqu­e, une fois l’échappemen­t, deux fuites d’huile et la perte d’un écrou – n’ont pas permis de rouler autant qu’il aurait fallu.

Une torture pour Fernando Alonso, véritable boulimique du volant, qui s’inscrit parfois à des compétitio­ns de karting sous un nom d’emprunt et qui disputera cette saison, sous son vrai nom, le Championna­t du monde d’Endurance en plus de la Formule 1. Eric Boullier y a vu «plus de positif que de négatif» et a donné le feu vert de McLaren. «Il y a dix ans, les pilotes faisaient deux à trois séances d’essais entre chaque Grand Prix. Aujourd’hui, ça n’est plus possible. Autant le laisser faire, ça le maintient dans le rythme.» Fernando Alonso rêve d’accrocher à son palmarès la triple couronne: GP de Monaco, 24 Heures du Mans, 500 miles d’Indianapol­is. Monaco, c’est déjà fait (en 2006 et 2007). Une chance?

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