Le déclin démographique de l’Europe est bel et bien amorcé
Depuis plus de 200 ans, le développement économique s’est accompagné d’une augmentation de la population, de l’allongement de l’espérance de vie, d’une baisse de la fécondité et d’une concentration de la population dans les villes. C’est en gros ce que l’on appelle la «transition démographique».
En 1986, des spécialistes ont développé le concept de «seconde transition démographique». Il décrit une phase où la fécondité se fixe durablement sous le niveau de remplacement des générations et devient indépendante du cadre légal de la vie en couple. La seconde transition démographique se caractérise tout à la fois par l’accentuation du vieillissement de la population et la multiplication des familles monoparentales et des personnes vivant seules. Elle prend place dans un contexte économique caractérisé par la stagnation du pouvoir d’achat de la majorité de la population.
Dit trivialement, nous sommes en plein dedans! Aujourd’hui, le débat se focalise sur les conséquences du vieillissement de la population, avec en particulier les incertitudes liées au financement futur des retraites et à l’explosion des coûts de la santé. Une nouvelle thématique devrait bientôt occuper le devant de la scène: le déclin démographique de l’Europe.
On le sait, il faut environ 2,1 naissances vivantes par femme pour maintenir constante la taille de la population en l’absence de toute migration. Cela fait belle lurette que l’Europe connaît des taux de fécondité bien inférieurs. Pour l’Union européenne, la moyenne est aujourd’hui de 1,6.
Les projections démographiques annoncent une stabilisation de la population de l’UE vers 2040 et l’amorce d’un lent déclin les décennies suivantes. Si l’on prend en compte le double effet de l’allongement des études et du vieillissement de la population, cela se traduira par une réduction notable de la population en âge de travailler. Le processus est déjà amorcé en Bulgarie, en Grèce, en Italie, au Portugal et en Roumanie. Il devrait s’accentuer au cours des décennies. Pour l’Allemagne, il devrait débuter autour de 2030. La France, le Royaume-Uni et les pays du Nord devraient en revanche connaître une croissance démographique lente mais continue.
Ces projections dépendent évidemment largement des hypothèses retenues pour l’immigration. La réponse de l’Europe à la crise migratoire déclenchée par la guerre en Syrie laisse difficilement imaginer un recours massif à l’immigration extra-européenne, dont une partie importante de l’opinion publique (vieillissante elle aussi) ne veut pas.
Quelles peuvent être les conséquences économiques du déclin démographique? Certains auteurs, anglo-saxons pour la plupart, ont pris une position tranchée: une baisse de la population s’accompagne inévitablement de conséquences économiques désastreuses, avec à la clé un appauvrissement général. D’autres adoptent une position plus nuancée. Avec l’avènement de la quatrième révolution industrielle, disent-ils, une réduction de la population active n’est pas forcément une catastrophe, elle pourrait même être favorable aux salariés, devenus plus rares et donc plus chers. La perspective de métropoles moins encombrées, offrant des logements à des loyers raisonnables, est plutôt alléchante. Sans compter qu’une diminution de la population est l’un des facteurs permettant de préserver l’environnement et la biodiversité.
Qui a raison, qui a tort? Impossible de trancher, évidemment. Un élément en tout cas devrait être pris en compte. A l’exception du cas particulier de la Chine (politique de l’enfant unique), la baisse du taux de fécondité est le résultat de choix personnels, faits en toute liberté, dans tous les pays développés. Elle constitue une adaptation des individus au monde tel que nous l’avons créé.
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