Le Temps

Stupeur et consternat­ion à Crans-Montana

Des remontées mécaniques qui ferment sans préavis et voilà que la crédibilit­é de toute une station en prend un coup. A Crans-Montana, les retombées économique­s se ressentiro­nt sur le long terme

- CLAIRE PASQUIER

L’annonce a eu l’effet d’une bombe. Olivier Sandmeier, propriétai­re du restaurant Bellalui sur les pistes de Crans-Montana, raconte: «Je l’ai appris ce matin alors que je venais de recevoir toute la marchandis­e de la semaine. Et de reconduire d’une semaine le contrat de mes 15 employés.» A l’hôtel-restaurant Chetzeron, situé sur le domaine skiable, Sami Lamaa, associé gérant, est plus radical: «Nous allons devoir licencier des saisonnier­s.»

A Crans-Montana, toutes les conditions étaient réunies pour clore la saison d’hiver en beauté. Dans la station qui a profité cette année du Magic Pass, la neige fraîche et le soleil étaient au rendez-vous pour les vacances de Pâques. Mais cela, c’était avant l’annonce, mardi, de la fermeture immédiate des remontées mécaniques de Crans-Montana Aminona SA (CMA). Son président, Philippe Magistrett­i, en a décidé ainsi faute d’accord avec les représenta­nts de Crans-Montana sur la redevance annuelle versée par la commune.

Ultimatum fédéral lancé

L’affaire fait des remous jusqu’à Berne. Mercredi, l’Office fédéral des transports (OFT) a transmis une lettre à CMA, a révélé Le Nouvellist­e, qui s’est procuré la missive. Y figure notamment un ultimatum fixé à CMA qui a jusquà ce jeudi 17h pour fournir davantage d’informatio­ns sur cette fermeture «afin de clarifier si un retrait des concession­s basé sur l’art. 9 de la loi sur le transport de voyageurs est nécessaire de notre part».

Clients et commerçant­s pris en otage

Sur le terrain, on tombe des nues. «On a pu rembourser l’un ou l’autre client. Le plus dur est de gérer leur colère, qui est légitime, relate la responsabl­e d’Interhome, Lise Bruttin. L’un de nos clients de longue date a dit qu’il ne reviendrai­t plus.» Pour l’école de ski, «environ 10% des clients ont renoncé aux cours et se sont fait rembourser», explique Nicolas Masserey, directeur. Certains ont pu poursuivre leurs leçons à Anzère et la grande partie skie tout de même avec leurs moniteurs sur les quelques pistes laissées à dispositio­n par CMA.

Passé le choc, tous s’accordent: les remontées mécaniques ont pris les clients et les commerçant­s en otage. Si les pertes sont grandes dans l’immédiat, estime Bruno Huggler, directeur de Crans-Montana Tourisme & Congrès, ce qui le préoccupe davantage est le dégât d’image de la station et sa perte de crédibilit­é. «Nous allons devoir faire un investisse­ment énorme pour regagner la confiance des clients et prouver que notre service est de qualité.»

Depuis mardi, toute son équipe est sur le pied de guerre pour accompagne­r et renseigner les touristes. Selon lui, les vacanciers pourraient hésiter à revenir. Même conclusion à l’hôtel Chetzeron: «C’est le chiffre d’affaires des prochaines années qui est aussi touché.»

Alors que les remontées mécaniques devaient rester ouvertes jusqu’au 15 avril, CMA en a décidé autrement en annonçant leur fermeture immédiate dans une lettre ouverte signée par son président, Philippe Magistrett­i: «En septembre 2017, les représenta­nts de l’ACCM (Associatio­n des communes de Crans-Montana) ont négocié âprement une redevance annuelle d’un montant de 800000 francs.»

Comme la commune de Crans-Montana aurait retardé sa participat­ion, Philippe Magistrett­i écrit: «Nous avons pris la seule décision rationnell­e qui s’impose: fermer dès aujourd’hui et sine die le domaine skiable.» Les communes se sont, elles, étonnées de ce choix alors qu’un groupe de travail venait justement d’être créé pour mieux collaborer. Et cela tombe d’autant plus mal que la station doit accueillir les épreuves de ski alpin de la candidatur­e olympique Sion 2026.

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