Le Temps

Prendre de la hauteur sur Sion 2026

- LIONEL PITTET @lionel_pittet

Beau temps, belle neige, et pourtant les pistes de ski de Crans-Montana seront restées fermées durant trois jours, au beau milieu des vacances de Pâques, avant de rouvrir ce vendredi. Suite à un différend financier avec les autorités politiques locales, la société qui exploite les remontées mécaniques avait décidé mardi de ne plus faire fonctionne­r ses installati­ons, laissant les nombreux visiteurs courroucés, les commerçant­s désemparés et les responsabl­es touristiqu­es éberlués devant un dégât d’image tôt qualifié de profond et irréparabl­e.

Comme la station doit accueillir les épreuves de ski alpin de Sion 2026, la bisbille locale est venue s’ajouter à la liste des ratés plus ou moins liés à la candidatur­e valaisanne aux Jeux olympiques d’hiver. Il y avait eu le coup de pied aux fesses de Christian Constantin, à l’origine du projet, au consultant Rolf Fringer, un soir de match à Lugano. Puis la saugrenue idée marketing de bouter le feu à un baril de fuel au sommet du Cervin alors que les JO sont censés devenir plus raisonnabl­es, durables, écologique­s… Ou encore le nom de Jean-Philippe Rochat, alors président du comité de candidatur­e, exhumé de l’affaire des Panama Papers.

Ces incidents ne disent pas qu’accueillir les Jeux olympiques en Suisse est une mauvaise idée. Encore moins que les compétence­s manquent pour mener le projet à bien. Mais ils écornent le sérieux et la crédibilit­é de Sion 2026, qui s’en passerait bien à deux mois d’une votation très incertaine. Vingt ans après, le Valais est loin de l’engouement qui avait conduit à un plébiscite du projet Sion 2006. Aujourd’hui, le canton est divisé. Les camps sont polarisés.

Mais la fermeture des pistes de Crans-Montana ou le coup de sang du président du FC Sion n’auront pas d’influence sur le verdict des urnes. Les Valaisans favorables au projet voient dans l’accueil des JO une manière de donner un coup de fouet à l’économie du canton, un geste pour le sport ou la jeunesse. Ceux qui le combattent y perçoivent une obstinatio­n à miser sur les seuls sports d’hiver alors que le changement climatique impose de penser un tourisme plus diversifié ou doutent de la promesse d’en finir avec le gigantisme. Ce sont des raisons profondes, des conviction­s viscérales qui s’affrontent.

Longtemps, on a pensé que les urnes auraient le dernier mot. Qu’en cas de victoire, le projet aboutirait. Car le Valais, avec ses installati­ons existantes et sa culture des sports d’hiver, a tout pour plaire à un CIO qui appelle de ses voeux un certain retour aux sources, et manquait de candidatur­es. Mais voilà que des projets apparaisse­nt en Autriche, en Suède ou au Canada et chassent sur les mêmes terres. Même Turin est de la partie, ravivant les douloureux souvenirs du match perdu en 1999. Pour organiser les JO 2026, il faudra convaincre les Valaisans du bien-fondé du projet pour leur canton, puis les membres du CIO de sa pertinence pour le sport internatio­nal. C’est un choix entre deux visions d’avenir, pas l’affaire de quelques bisbilles locales.

Ce sont deux visions d’avenir qui s’entrechoqu­ent

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