Le Temps

Treize entraîneur­s virés en une saison: les errances du football suisse

Il n’y aura en fin de saison qu’un seul relégué en Super League et aucun en Challenge League, ce qui n’empêche pas les clubs de multiplier les changement­s d’entraîneur

- LAURENT FAVRE @LaurentFav­re

La lutte contre la relégation ne concerne plus le seul FC Sion. Grasshoppe­r et Lugano en sont bien conscients, qui viennent de licencier leur entraîneur. A Zurich, Murat Yakin, arrivé en cours de saison de Schaffhous­e, est débarqué après seulement 22 matchs. Le directeur sportif Mathias Walther assure l’intérim. Au Tessin, Pierluigi Tami est remplacé par Guillermo Abascal, limogé… une semaine plus tôt par Chiasso.

Le jeu des chaises musicales se poursuit donc dans le football suisse. Yakin et Tami en sont les sixième et septième victimes, après – par ordre chronologi­que d’éviction – Carlos Bernegger (GC), Paolo Tramezzani (Sion), Markus Babbel (Lucerne), Gabri (Sion) et Uli Forte (FC Zurich). Les dix clubs de Super League ont déjà utilisé 17 entraîneur­s. Et ce n’est peut-être pas fini: Walther n’est qu’un intérimair­e à GC et la lutte pour le maintien va désormais stresser cinq équipes, réunies en quatre points: GC (32 points), Thoune (31), Lausanne (31), Lugano (31), Sion (28).

En Challenge League, où Neuchâtel Xamax (18 points d’avance sur Servette) est quasi assuré de monter et où Wohlen a annoncé dès cet hiver son refus de solliciter une licence de jeu profession­nelle pour la saison prochaine, la situation n’est guère plus stable alors que, pourtant, tout est joué. Winterthou­r, Servette et Aarau ont déjà cédé à la tentation du siège éjectable, souvent pour basculer déjà sur la saison prochaine. Chiasso a licencié la semaine passé Guillermo Abascal, qui aura donc très vite rebondi, à l’échelon supérieur qui plus est! Ce n’est pas le moindre paradoxe de ce très jeune entraîneur espagnol (29 ans) qui dirigeait la saison passée les juniors M13 du FC Séville.

Le beaucoup plus expériment­é Murat Yakin avait, lui, commencé la saison de la meilleure des manières avec Schaffhous­e en Challenge League (cinq matchs, cinq victoires). Il n’a jamais pu reproduire cette réussite en Super League. En 22 matchs, son bilan est négatif: sept victoires, six nuls et neuf défaites. Surtout, GC n’a remporté qu’une seule de ses huit dernières rencontres.

Fonctionne­r par séries, positives ou négatives, est une caractéris­tique commune à de nombreuses équipes. Au premier tour, Lausanne-Sport a enchaîné six matches sans victoire, puis sept matches sans défaite, puis quatre matches perdus sur cinq. Le FC Bâle a commencé par quatre matchs sans victoire, suivis de onze sans défaite jusqu’à la trêve. A la reprise, les Bâlois n’ont gagné qu’un seul de leurs cinq premiers matchs. Lugano, quatrième après 22 journées et une série de quatre succès de rang, a depuis essuyé six défaites consécutiv­es. Equipe en forme de la fin de l’hiver, Saint-Gall a gagné cinq matchs de suite, série terminée.

Celle du FC Lucerne, sept victoires et un nul, s’est achevée ce weekend à Thoune (1-0). C’est le premier revers pour Gerardo Seoane, nommé le 9 janvier après le renvoi de l’Allemand Markus Babbel. Lucerne est le seul club de la Swiss Football League où le «choc psychologi­que» a effectivem­ent fonctionné. A Sion, même si l’espoir est revenu, le bilan de Maurizio Jacobacci est neutre (trois victoires, deux nuls, trois défaites).

Certains clubs ont su résister à la tentation de virer l’entraîneur. Paradoxale­ment, ce sont ceux qui avaient peut-être le plus de raisons de le faire. Largué en championna­t, le FC Bâle vit sa plus mauvaise saison depuis huit ans mais n’envisage pas de se séparer de Raphaël Wicky. A Lausanne, le changement de logo a secoué tout le canton mais le remplaceme­nt de Fabio Celestini n’a jamais été vraiment à l’ordre du jour. A Thoune, Marc Schneider a survécu à cinq défaites consécutiv­es, dont un 7-2 à Sion. Depuis, les Bernois, véritables spécialist­es du maintien, n’ont plus perdu (un nul contre Lausanne, deux victoires à GC et contre Lucerne).

Il ressort de tout ceci le sentiment de décisions prises dans l’urgence, le stress et sous le coup de l’émotion bien plus que de la raison. Un meneur d’hommes succède à un tacticien, un novice remplace un

Pierluigi Tami, licencié à Lugano. L’une des nombreuses victimes de la récente valse des entraîneur­s.

coach expériment­é, les has been d’hier ont toutes les chances de revenir en grâce demain. Tout cela sans aucune logique. A Chiasso, le successeur de Guillermo Abascal est connu: il s’agit de Baldo Raineri. Le Sicilien n’aura pas de peine à trouver ses marques à Riva IV: il était déjà l’entraîneur la saison passée avant d’être remplacé par… Guillermo Abascal. A côté de la Super League, un résumé des Feux de l’amour est limpide!

Des décisions prises dans l’urgence, le stress et sous le coup de l’émotion plus que de la raison

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(KEYSTONE/TI-PRESS/SAMUEL GOLAY)

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