Place publique
Castro (Jean-Pierre Bacri) a été une grande star de la télé, tendance Ardisson. Il est en voie de devenir un has been. Ce qui n’arrange pas son caractère: imbus de lui-même sous une perruque ridicule, il est odieux avec tous les invités du raout champêtre organisé par Nathalie (Léa Drucker), sa productrice, et particulièrement avec son ex-femme, Hélène (Agnès Jaoui), qui pratique l’angélisme de gauche alors qu’il s’adonne au cynisme de droite. Quant à sa jeune compagne, elle fait les frais de ses flambées de jalousie. Dans cette volière de people divers, il y a aussi sa fille: elle a écrit un livre à clés dans lequel il se reconnaît sous les traits d’un chauve honteux. Il y a encore les stars montantes du stand-in et d’internet réunis, glandeurs satisfaits à qui l’avenir sourit. A quelques reprises, le paysan d’à côté vient gueuler contre les décibels: ces gens de la ville, ils croient que les vaches font la grasse matinée le week-end…
Après Le Goût des autres, Comme une image, Parlez-moi
de la pluie et Au bout du conte, voilà le cinquième film d’Agnès Jaoui, coscénarisé avec Jean-Pierre Bacri.
Place publique perpétue leur art inimitable de la comédie douce-amère, caractérisé par une écriture raffinée. Plus acidulée que vitriolesque, cette satire sociale convoque une ribambelle de personnages vivant à fleur de peau dans leurs contradictions, tel le cuisinier tchèque qui n’aime pas les étrangers, et laisse à chacun une chance – le fiancé ringard démontre sa sensibilité au karaoké. Même Castro se rachète en chantant «Osez Joséphine» de Bashung.
Le seul défaut de ce film adorable est de sortir quelques mois après «Le Sens de la fête», de Nakache & Toledano, avec Jean-Pierre Bacri dans le rôle principal, ce qui lui donne un léger air de déjà-vu.
COMÉDIE D’AGNÈS JAOUI. SORTIE ME 18.