La Patrouille des glaciers, un exploit physiologique
Zermatt-Verbier: distance 53 kilomètres, point culminant 3650 mètres d’altitude, des températures avoisinant les -20°C. Telles sont les conditions extrêmes qui attendent le week-end prochain les concurrents de la Patrouille des glaciers. Mais quels sont les effets physiologiques de l’altitude et des basses températures durant un effort aussi violent et prolongé?
Les personnes entraînées sont plus touchées par l’altitude. Cela semble paradoxal, c’est pourtant vrai. Plus l’entraînement en endurance a été long et intense, meilleur est l’athlète, mais plus ses performances seront diminuées en altitude. Certes un athlète reste toujours meilleur qu’un sédentaire, mais ses avantages sont moindres. L’entraînement améliore la capacité des muscles à consommer de l’oxygène pour produire de l’énergie. Il améliore aussi la respiration et le système cardiovasculaire pour transporter plus efficacement et en plus grande quantité l’oxygène jusqu’aux muscles. Or, en altitude, l’air, et donc l’oxygène, se fait plus rare, les adaptations à l’entraînement ne sont plus aussi bénéfiques qu’au niveau de la mer.
L’oxygène passe de l’air au sang parce qu’il diffuse depuis les alvéoles pulmonaires à travers les membranes jusqu’à se fixer sur les globules rouges. Le moteur de cette diffusion est la pression en oxygène, elle est beaucoup plus forte dans l’air que dans le sang qui arrive aux poumons. L’oxygène est donc naturellement poussé vers le sang. Au niveau de la mer, le sang qui repart des poumons est pleinement oxygéné. A 3650 m, la pression atmosphérique est diminuée d’un tiers, la pression en oxygène l’est d’autant et la différence de pression entre air et sang est quant à elle diminuée de moitié, le moteur de diffusion est donc moitié moins fort. Pour essayer de compenser cette baisse de pression en oxygène, la respiration et le rythme cardiaque de repos s’accélèrent, il en résulte une perte d’oxygénation du sang limitée à environ 15%.
A 3600 m, l’avantage du sédentaire
Durant l’exercice, la situation s’aggrave, le coeur des athlètes est plus gros et plus fort, leur débit sanguin est supérieur, le temps de passage du sang dans les poumons s’en trouve réduit. Au niveau de la mer le problème est limité puisque la forte pression d’oxygène permet une bonne oxygénation du sang. En revanche en altitude, la faible pression en oxygène combinée au faible temps de passage du sang dans les poumons provoque une désoxygénation du sang bien plus importante chez l’athlète que le sédentaire. A 3650 m, pendant un exercice intense, un sédentaire perd environ 20% d’oxygénation et un athlète entre 30 et 35%!
Cette diminution de l’oxygénation du sang artériel est bien entendu délétère pour l’activité musculaire, mais aussi pour le fonctionnement du cerveau, très gourmand en oxygène et donc très sensible à sa diminution. Etourdissements, nausées, perte de lucidité peuvent en milieu montagneux aboutir à des accidents aux conséquences graves, d’où l’intérêt de concourir en patrouille, encordés, en se surveillant les uns les autres, de bien se connaître et de bien connaître la montagne.
Pourquoi le froid altère la performance
Les effets du froid sont moins bien connus que les effets de la baisse de pression en oxygène, néanmoins ils altèrent la performance. L’inhalation d’un air froid et sec irrite les bronches, ce qui gêne la respiration et oblige les muscles respiratoires à travailler davantage, consommant ainsi de l’oxygène qui était destiné aux muscles locomoteurs. Cette irritation provoque aussi un épaississement de la paroi des alvéoles pulmonaires gênant ainsi la diffusion de l’oxygène et contribuant à diminuer l’oxygénation du sang.
Pour des exercices réalisés à des températures allant de -5° à 20°C, les vaisseaux de la peau se dilatent, ce qui élimine de la chaleur et facilite le travail du coeur en diminuant la résistance à l’écoulement du sang. A -20°C, cette dilatation ne se fait que très faiblement afin de limiter la perte de chaleur et conserver la température corporelle autour de 37°C. Le travail du coeur n’est donc pas facilité, ce qui altère le débit de sang destiné aux muscles. Enfin, le froid ralentit les réactions biochimiques se déroulant dans le muscle, péjorant ainsi sa capacité de contraction.
Entraînez-vous!
Malgré tout, l’entraînement reste le seul moyen de parvenir jusqu’à la ligne d’arrivée et d’y prendre plaisir! Rappelez-vous qu’un athlète surpasse toujours un sédentaire, surtout s’il complète sa préparation physique par un entraînement technique et une bonne connaissance de la montagne.
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